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Article 16 :

Filières industrielles: l’heure des controverses

Face à la hausse du prix des matières premières, les opérateurs du bioéthanol et du biodiesel doivent convaincre.  

 

Retrouvez tous les références utiles sur les filières industrielles en bas de page.

 

L’avenir, pour certains, fausse bonne idée pour d’autres: les biocarburants de première génération font ces derniers mois de plus en plus l’objet de remises en cause sur le plan environnemental, énergétique ou en termes de concurrence avec l’alimentation. Michel Barnier, ministre de l’Agriculture, a toutefois réaffirmé, le 13 février 2008: «Le gouvernement continue de soutenir la politique de développement des biocarburants», sans revenir sur les engagements pris. «La seconde génération ne se fera pas en rupture avec les investissements réalisés pour la première génération, mais en continuité», a assuré Michel Barnier, rappelant qu’il «fallait faire la preuve économique, énergétique et écologique» du bioéthanol et du biodiesel, les deux types de biocarburants produits industriellement.

Une réactualisation de l’étude "Ademe/Direm" de 2002 a ainsi été lancée après le Grenelle de l’environnement, sur les bilans énergétiques et les émissions de gaz à effet de serre des biocarburants. Verdict au printemps de 2008.

 

  

1. Filière du biodiesel: l’enjeu des surfaces

Le biodiesel est issu de l’huile de colza (70%), l'huile de tournesol (10%), l’huile recyclée et des graisses animales (20%), transformées par estérification avec du méthanol en ester méthylique d’huile végétale (EMHV) ou ester méthylique d’huile animale (EMHA). Il est incorporé dans le gazole à hauteur de 5% en volume pour une utilisation banalisée (le plus fréquent) ou à 30% pour des flottes urbaines soumises à dérogation.

 

Etat des lieux: 1,4 Mha d’oléagineux à mobiliser d’ici à 2010

Selon les résultats d’une étude réalisée en 2007 par le Comité des biocarburants et de la biomasse, sous l’égide de l’OniGC, l’incorporation de 7% (en contenu énergétique) de biocarburants en 2010 représente la production de 2,6 millions de tonnes (Mt) de biodiesel. Ce qui mobilisera 1,45 million d’hectares (Mha) d’oléagineux, pour un besoin total de 2 Mha.

«L’expansion du biodiesel impose donc l’utilisation de terres en jachère», estimait le ministère à la fin de 2006. La disparition pérenne du gel obligatoire pourrait mettre à mal le développement de la filière, dans un contexte de hausse des prix des oléagineux pour l’alimentaire. «Les surfaces d’oléagineux peuvent encore augmenter de 300.000 ha, assure Xavier Beulin, président de la Fédération française des producteurs d’oléagineux et protéagineux. Et la totalité des graines et huiles sera transformée en France.» Selon l’étude "Ademe/Direm" de 2002, la filière du biodiesel présente un rendement énergétique proche de 3 (rapport entre l’énergie restituée et l’énergie renouvelable mobilisée), à comparer avec le rendement du gazole de 0,9. Le cabinet PriceWaterhouseCoopers a réactualisé cette étude en 2007 pour le compte de Diester industrie, principal opérateur en biodiesel. Le rendement énergétique approcherait désormais les 3,6 pour le colza et 4 pour le tournesol.

 

Perspectives: une prime de «fidélité» à l’étude

Diester industrie s’engage à payer aux organismes stockeurs (en contrat pour trois ans) la graine de colza au moins à 95% du prix du Matif, avec pour la récolte de 2007 des compléments de prix de 35 euros par tonne, soit au total un prix de 316 €/t, base janvier, rendu usine. Aujourd’hui, les prix élevés en colza et tournesol alimentaires changent la donne. Afin de convaincre les producteurs de ne pas se désengager de la filière du biodiesel et pour sécuriser ses approvisionnements, Diester industrie réfléchit à la mise en place d’une contractualisation sur trois ans entre l’agriculteur et son organisme stockeur (un an aujourd’hui), avec à la clé une «prime d’engagement», «une sorte de prime de fidélité pour éviter l’effet zapping d’une année sur l’autre entre culture alimentaire et culture énergétique», explique Xavier Beulin. Un dispositif qui pourrait voir le jour en 2009, pas avant.

 

 

2. Filière du bioéthanol: icorporation directe attendue

Le bioéthanol est élaboré par fermentation des sucres issus de la betterave (70% de la production aujourd’hui), ou de blé et de maïs (30%). Il est destiné aux moteurs à essence, après transformation en ETBE (éthyl tertio butyl éther) ou en incorporation directe dans l’essence (5% au maximum en volume). Pour atteindre l’objectif français de 7% de bioéthanol en 2010, 740.000 tonnes doivent être produites par an.

 

Etat des lieux: six nouvelles usines

Selon l’OniGC, cela mobilisera 223.000 ha de blé et maïs (2,5% des surfaces céréalières actuelles) et 40.000 ha de betteraves (12% de la sole) qui feront fonctionner six nouvelles unités de fabrication. En 2007, 105.000 ha de céréales et 27.500 de betteraves ont été déclarés à des fins énergétiques. Aujourd’hui, une seule usine d’éthanol fonctionne à partir de blé, celle de Tereos, à Lillebonne, pour laquelle des contrats avec les producteurs ont été signés en 2006 pour cinq ans. L’entrée en activité des autres usines prend du retard, avec la délicate question de l’approvisionnement en céréales.

Le rendement énergétique de la filière du bioéthanol est voisin de 2, à comparer avec un rendement pour la filière de l'essence de 0,87. Mais celui de la filière de l'ETBE est proche de 1. «Les nouvelles unités de distillation améliorent le bilan énergétique de la production de bioéthanol. Il est désormais supérieur à 3», assure le SNPAA (Syndicat national des producteurs d’alcool agricole).

 

Perspectives: rémunération peu attractive

Pour atteindre les objectifs d’incorporation, la filière du bioéthanol demande le développement de l’incorporation directe, jusqu’à 10% dans l’essence. Pour cela, il faudrait un déplafonnement de la limite de 5% en volume fixée par Bruxelles. La directive relative à la qualité des carburants, en cours de discussion au niveau européen, pourrait élever ce taux à 10%.

Aujourd’hui, l’essentiel de l’utilisation d’éthanol se fait sous forme d’ETBE, avec un seul acheteur, Lyondell, qui fait le marché.

A 55-56 €/hl (au départ du Brésil), le prix de l’éthanol ne permet pas aux industriels et coopératives de rémunérer suffisamment les céréales et les betteraves destinées à ce débouché. Le prix payé aux producteurs dépend en effet du prix de l’éthanol, du rendement de l’usine et de la commercialisation des sous-produits. Le blé éthanol destiné à Lillebonne est payé cette campagne seulement 115 €/t (au 1er février).

«L’incorporation directe permettrait de libérer l’éthanol du carcan de l’ETBE, de diversifier les opérateurs et ainsi d’augmenter le prix de l’alcool européen», assure Jean-François Loiseau, président du groupe coopératif Agralys, partenaire de BENP Lillebonne, face à des producteurs devenus dubitatifs vis-à-vis de cette nouvelle filière.

 

7% d’incorporation de biocarburants en 2010

Le gouvernement a donné un coup d’accélérateur aux biocarburants en 2005 et 2006 en annonçant la construction de nouvelles usines. Objectif: atteindre 5,75% d’incorporation de biocarburants en mélange dans le gazole et l’essence en 2008, 7% en 2010 et 10% en 2015, contre 1,75% en 2006 et 3,5% en 2007. Le plan relatif aux biocarburants français va au-delà des objectifs de Bruxelles, qui vise l’incorporation de 5,75% en 2010, 7% en 2015 et 10% en 2020. Au total, 3,8 Mt ont été agréées par le gouvernement depuis mai 2005, donnant droit à une défiscalisation: 2,8 Mt en biodiesel et 1 Mt en éthanol. Outre le développement des usines existantes, vingt et une usines nouvelles, dont six produisant de l’éthanol et une quinzaine du biodiesel, vont être construites (téléchargez la carte des usines en France ). Ce qui représente un investissement de 500 millions d’euros pour la filière du Diester et 1 milliard d’euros pour l’éthanol.

 

Fiscalité non pérenne

- Les biocarburants bénéficient d’une exonération partielle de TIC (taxe intérieure de consommation, ex-TIPP) afin de compenser le surcoût de production par rapport aux carburants fossiles. Cette défiscalisation est toutefois rediscutée annuellement dans le cadre du vote de la loi de finances. Pour 2008, l’éthanol voit ainsi son exonération partielle de TIC réduite à 27 €/hl contre 33 €/hl en 2007. Pour l’EMHV, l’éxonération partielle reste inchangée, à 25 €/hl.

- Les agriculteurs consacrant une partie de leurs surfaces hors jachère aux biocarburants bénéficient d’une aide aux «cultures énergétiques» de 45 €/ha.

 

E 85: décollage raté

Annoncé en grande pompe en juin 2006, le plan de développement de l’E 85 (85% d’éthanol en volume, 15% d’essence) ne tient pas ses promesses. Les volumes produits au cours du premier semestre de 2007 représentent quelques centaines de mètres cubes. Six marques et douze modèles de voitures «flexfuel» fonctionnant au superéthanol sont disponibles, mais le parc du «flexfuel » en France comptait seulement 4.250 voitures à la fin de 2007, soit 0,16% des ventes de véhicules particuliers. Moins de 200 stations-service proposent de l’E 85 en France, essentiellement dans la grande distribution. Le dernier coup de poignard est venu du gouvernement: l’abattement de 50% sur le malus des véhicules flexfuel a été supprimé dans la loi de finances rectificative pour 2007.

 

Pour en savoir plus:

 

 

 

 

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(1) Les références de ces quatre documents sont repris dans "Document de références (adresses et textes)"

(publié le 22 février 2008)

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