Le gouvernement est prêt à financer une nouvelle culture expérimentale de vigne transgénique à l'Inra de Colmar, après que la précédente parcelle d'essai a été saccagée le 15 août 2010 par des militants anti-OGM, a annoncé sur place, mardi, le ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire.
« Nous mettrons à la disposition de l'Inra les moyens financiers nécessaires pour qu'elle puisse relancer ses recherches », a déclaré le ministre, venu à Colmar constater les dégâts en compagnie de son homologue chargée de la Recherche, Valérie Pécresse.
Pour l'heure, un redémarrage de cet essai – destiné à faire avancer la lutte contre la maladie du court-noué et qui représentait sept ans de recherche – reste toutefois hypothétique, car les équipes concernées sont découragées, a laissé entendre le directeur de l'Inra de Colmar, Jean Masson.
« Je suis retourné. La recherche, ce sont des gens qui travaillent, qui s'investissent, et quand vous leur tapez dessus tout le temps, à la fin du compte, ça fait mal », a confié M. Masson. « Il ne s'agit pas de laisser la place à ceux qui nous empêchent d'avancer, mais on ne peut pas repartir comme ça, demain matin, la fleur au fusil, il faut réfléchir, il faut attendre que ça se décante », a-t-il ajouté.
« Je comprends ce désarroi, mais on est là pour lutter contre le découragement », lui a répondu le ministre de l'Agriculture.
De son côté, Valérie Pécresse a souligné que « l'on a besoin de la recherche en France, y compris sur la question des organismes génétiquement modifiés ».
« Nous vivons dans un monde global. Si la France n'a pas des chercheurs capables de mesurer le potentiel et le danger des OGM, (...) nous serons affaiblis. Nous importerons, nous consommerons des produits qui nous seront imposés par d'autres et dont nous ne connaîtrons pas les effets ni sur l'environnement ni sur la santé », a-t-elle insisté.
« Nous devons avoir des chercheurs qui cherchent dans la sérénité. C'est une question d'indépendance nationale », a-t-elle ajouté.
Les deux ministres ont une nouvelle fois vivement condamné le saccage des 70 plants de vigne OGM, d'autant plus inacceptable, selon eux, que les OGM en question n'étaient pas destinés à être commercialisés mais seulement à la recherche fondamentale. En outre, ont-ils fait valoir, les ceps OGM ne présentaient aucun danger pour l'environnement ou la santé.
Les quelque 60 faucheurs d'OGM qui ont détruit la parcelle ont notamment mis en doute la gravité du court-noué, virose transmise par des nématodes.
L'un d'eux, le viticulteur bio alsacien Jean-Pierre Frick, a en outre argué dans le journal Libération du 23 août 2010 que « cet essai en plein champ est surtout destiné à faire accepter les OGM en France ».
Des arguments balayés mardi par le ministre de l'Agriculture. « Je suis un grand amateur et un grand consommateur de vin d'Alsace, je le dis pour M. Frick : j'apprécie plus son vin que son comportement en la matière. »
De leur côté, les représentants des semenciers et des industriels de la protection des plantes en France demandent dans un communiqué « l'application stricte » de la loi sur les OGM de juin 2008, et notamment « la poursuite avec la plus grande fermeté des auteurs de cette destruction ». Selon eux, « c'est une condition préalable à toute reprise d'essais OGM en plein champ en France ».
« La vitalité de la recherche d'un pays se mesure aux projets publics et privés, ainsi qu'à ses partenariats publics-privés. Nous demandons donc au gouvernement d'assurer la protection des travaux de recherche que constituent les expérimentations au champ », a ainsi déclaré Philippe Gracien, porte-parole des professionnels des semences et de la protection des plantes.
Lire également :