L'EMB (European Milk Board) et la Coordination européenne Via Campesina (1) ne sont pas satisfaites des propositions faites au mois de décembre par la Commission européenne pour le secteur laitier et demandent au Conseil et au Parlement européen de les modifier, selon leurs communiqués, publiés lundi.
A l'occasion de la Semaine verte, un important salon agricole à Berlin, Romuald Schaber, le président de l'EMB, a déclaré que « le cœur du problème du secteur laitier » est que « le volume sur le marché est trop élevé. C'est pourquoi les producteurs sont dans une position affaiblie vis-à-vis des transformateurs et du commerce ».
« En pensant qu'on peut résoudre ce problème avec des contrats ou des organisations interprofessionnelles, la politique européenne fait fausse route », a-t-il ajouté.
Pour l'EMB, une politique laitière « efficace » doit être fondée sur deux éléments : le regroupement des producteurs et la maitrise des volumes de lait par les producteurs.
« Il faut installer une agence de surveillance européenne. Cette agence fixerait une fourchette de prix, basée sur les coûts de production qui servirait d'orientation pour l'adaptation des volumes », propose l'EMB.
L'organisation note comme un point « positif » le rapport de la Commission européenne concernant le marché laitier qui « reconnaît la renonciation aux livraisons volontaires comme instrument possible pour éviter les excédents ».
« C'est une démarche importante qui, contrairement aux augmentations des quotas, aux subventions à l'exportation et aux achats à l'intervention, n'inonde pas le marché avec du lait pour ensuite s'en débarrasser à un prix élevé », estime l'EMB.
A la suite d'un séminaire européen sur les perspectives laitières européennes organisé en Espagne, les 21 et 22 janvier, Via Campesina « rappelle que sans maitrise de la production, les conditions ne seront pas réunies pour avoir des prix du lait justes et stables pour les producteurs, quels que soient les instruments mis en œuvre par ailleurs ».
L'organisation « soutient le gouvernement polonais qui souhaite le maintien des quotas laitiers après 2015 et propose d'en améliorer le fonctionnement et la répartition ».
« Une interprofession laitière doit être établie obligatoirement dans chaque Etat membre. Doivent y siéger toutes les organisations paysannes, l'industrie laitière, les coopératives, la distribution, les consommateurs. L'Administration doit y jouer un rôle d'arbitrage », propose Via Campesina.
« Ces interprofessions doivent négocier et s'accorder sur les prix du lait, en tenant compte des coûts de production des éleveurs. La réglementation de l'UE doit être modifiée pour permettre aux interprofessions de le faire », poursuit-elle.
Elle s'oppose « à l'établissement d'organisations de producteurs qui négocieraient les prix, comme le propose la Commission : ce rôle doit être dévolu aux organisations paysannes au sein des interprofessions », précise-t-elle.
Dans ces conditions, « des contrats pourraient être établis » mais les organisations membres de Via Campesina appelleraient « à rejeter tout contrat ne respectant pas un prix lié au coût de production ».
« La transparence et le rééquilibrage des marges au sein de la filière laitière est indispensable à la légitimité de la politique laitière européenne vis-à-vis des producteurs et des consommateurs », ajoute l'organisation.
« La réforme proposée par la Commission ne va pas résoudre la situation dramatique de nombreux éleveurs européens, ni stopper la disparition de nombreuses exploitations laitières. (...) Concentrer la production dans de grandes exploitations industrialisées dans quelques régions serait un désastre social, environnemental et territorial », conclut-elle.
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(1) En France, les organisations membres de l'EMB sont l'Apli (Association des producteurs de lait indépendants) et l'OPL (Organisation des producteurs de lait, affiliée à la Coordination rurale). La Confédération paysanne et le Modef sont membres de la Coordination européenne Via Campesina.
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Lait/Contractualisation : proposition de Bruxelles pour « renforcer la position du producteur » (9 décembre 2011)