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«Aller chercher la manne des industriels avec les dents» (AG de l'OPL)

Publié le mercredi 31 mars 2010 - 20h32

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Lait : « Aller chercher la manne des industriels avec les dents » ( AG de l'OPL)

Lors de l’assemblée générale de l’Organisation des producteurs de lait (OPL, branche laitière de la Coordination rurale), le 31 mars 2010, il a beaucoup été question d’Europe. De l’Europe libérale qu’il faut changer, de la compétition organisée entre producteurs pour tirer à la baisse le prix du lait, de l’EMB et de son projet d’Office européen du lait.

 

Willem Smeenk, producteur de lait dans le Lot-et-Garonne et membre de l’OPL investi dans l’EMB, a présenté les coûts de production du lait aux Pays-Bas. « Le lait, rémunération du travail et du capital incluse, coûte 48 centimes d’euro par litre à produire, explique-t-il. Les producteurs vivent sous la perfusion des banques. »

 

Un éleveur hollandais membre de l’EMB, Peter Ten Hoeve, précise : « Si les producteurs mangent aujourd’hui, c’est qu’ils ont arrêté de rembourser leurs emprunts aux banques depuis un an. »

 

L’argument avancé par les industriels quant à la compétitivité entre la France et les pays du nord de l’Europe passe de plus en plus mal, en particulier, leur demande d’un indicateur de compétitivité avec l’Allemagne.

 

« Nous répéter qu’on n’est pas compétitif en France, c’est une intoxication organisée, résume François Lucas, président de la Coordination rurale. L’un des mérites de l’EMB, c’est de nous permettre de nous comparer d’un pays européen à l’autre et de savoir réellement ce qui se passe ailleurs. »

 

« J’ai l’impression que l’Europe n’est là que pour les industriels et les financiers, renchérit Daniel Condat, président de l'OPL. Où est la place du peuple ? Les politiques doivent être guidés. Il faut leur dire ce que nous souhaitons, et ils doivent travailler dans un sens collectif, et non pour quelques-uns. »

 

Le syndicalisme majoritaire et les industriels suscitent autant l’un que l’autre la colère des participants. Le cumul des mandats de Jean-Michel Lemétayer, de Xavier Beulin et de Gérard Budin provoque des sifflets dans l’assistance, tandis que Lactalis, son bénéfice et ses achats en Espagne ne font que renforcer la méfiance des éleveurs vis-à-vis de leurs laiteries.

 

L’autosatisfaction de la FNPL (les producteurs de lait de la FNSEA) d’avoir obtenu un compromis est vertement critiquée. « On va encore travailler à perte, avec un accord qui continue à nous payer sous nos coûts de production, estime Daniel Condat. Moins d’un an après la signature de l’accord du 3 juin, il ne convient déjà plus aux industriels. Cela en dit long sur la mentalité des industriels et ça augure mal du respect des futurs contrats ! »

 

Le fait que le ministre soit intervenu prouve, selon l’OPL et l’Apli, qu’il n’existe plus de rapport de force entre la FNPL et les industriels. « Aujourd’hui, à la tête des entreprises laitières, il y a de jeunes loups impitoyables, des financiers, rappelle Michel Legrand, président de la chambre d’agriculture du Calvados. Le temps où le président connaissait chaque petite ferme est fini ! Arrêtons d’avoir des scrupules, les producteurs n’ont pas à être la variable d’ajustement des industriels. »

 

Mais que faire ? La question revient à plusieurs reprises parmi l’assistance. Et les dirigeants du syndicat apparaissent finalement assez démunis. « D’autant qu’il y a de plus en plus de répression dès qu’on manifeste », souligne un membre de l’Apli de la Manche, Pierre Bougeard.

 

Patrick Le Hyaric, député européen, critique également ses collègues politiques. « Il est de bon ton de s’apitoyer sur votre sort, mais ce qu’on oublie de dire, c’est que la situation d’aujourd’hui n’est le résultat d’aucune fatalité, mais des politiques successives mises en œuvre via la Pac, constate-t-il. Quand on a accepté de supprimer les quotas, c’était un pas de plus vers la dérégulation. »

 

Mais de solution, il n’y en a pas réellement. « Il faut trouver un nouveau système de préférence communautaire, combiné à des possibilités d’échange avec d’autres groupes de pays. Et revenir à un prix de base garanti rémunérateur intra-européen. » Il avoue cependant qu’il lui paraît impossible à ce jour de réunir une majorité au Parlement européen sur ces bases.

 

Cependant, quelques interventions redonnent un peu d’optimisme. Ainsi, Peter Ten Hoeve estime que la création d’un groupe d’experts de haut niveau par la Commission est « un signe très fort ». « Avant, on ne discutait même pas, il y avait la libéralisation et rien d’autre. Aujourd’hui, on a réussi à remettre la question laitière sur le devant de la scène. Dans plusieurs pays où l’EMB est présente (Autriche, Pays-Bas, Allemagne), le “lait équitable” se met en place. »

 

Patrick Le Hyaric estime également qu’il est possible de trouver des alliances avec certains Etats membres pour revenir à des régulations un peu plus favorable à la dérégulation d’aujourd’hui. Il appelle à une mobilisation plus large, en se tournant vers d’autres catégories de la population. « Il faut agir dans la rue, auprès de l’Assemblée nationale, auprès des députés du Parlement européen, de tous les bords politiques, appelle-t-il. Ce n’est pas le moment de rester inactif, les choses peuvent changer. »

 

Daniel Condat, en conclusion, rappelle que l’OPL s’emploie déjà à rencontrer les hommes politiques et que l’EMB accomplit « un travail important » au niveau européen, entre autres via le groupe de haut niveau parallèle qu’il a créé, et auquel participent des agronomes, des économistes…

 

« Les choses sont en route. Il y a un an, personne n’écoutait nos propositions. Aujourd’hui, des portes sont ouvertes. » Et le ton se fait menaçant vis-à-vis des industriels. « Les industriels voient leur manne menacée, il ne veulent pas la lâcher. Il va falloir aller la chercher avec les dents ! Qu’ils fassent attention… Tôt ou tard, on se retrouvera en face d’eux pour faire valoir nos droits. »

 

 

Lire également :

Prix du lait : un compromis obtenu entre producteurs et industriels (VIDEO) (30 mars 2010)

Prix du lait : « Il n'y a plus de raison de manifester » (Lemétayer) (30 mars 2010)

Prix du lait : pour les industriels privés, l'essentiel reste à faire (31 mars 2010)

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E.C.


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