En cette période de vendanges et de récoltes des fruits d'automne, le CESE (Conseil économique, social et environnemental) a adopté le 9 septembre 2014 un avis sur les enjeux de la saisonnalité dans les filières agricoles.
Selon Rafael Nedzynski, rapporteur du projet d'avis pour le CESE, « 90.000 exploitations emploient des saisonniers, soit près d'un million de contrats sur l'année ».
« Pour les entreprises, la saisonnalité est souvent génératrice de fragilité, indique son rapport : dépendance aux conditions climatiques, chiffre d'affaires réalisé sur une courte période avec des charges fixes sur toute l'année, difficulté de gérer leurs crédits, amortissements et fonds de roulement, forte rotation de la main-d'œuvre... Pour les salariés, le contrat saisonnier est un contrat à durée déterminée moins protecteur (absence de prime de précarité, journées de travail plus longues, repos plus courts, difficultés pour se loger et se déplacer, etc.), avec des droits sociaux particuliers. »
Se former à la gestion du personnel
Parmi ses nombreuses préconisations, le CESE accorde une place importante à la pérennisation des emplois (pluriactivité, formation professionnelle...) et à l'amélioration des conditions de vie et de travail des salariés saisonniers. Il estime ainsi nécessaire d'améliorer l'accueil et l'intégration des saisonniers dans les entreprises. En mettant en place, par exemple, « des actions de formation en avant-saison » à leur attention, sur les savoirs de base, les règles d'hygiène et de sécurité.
Et pour les employeurs : « Il serait souhaitable de prévoir, dans les cursus de formation initiale des filières agricoles, un module consacré plus précisément à la gestion du personnel, indique le texte. En effet [...], rien n'est prévu pour préparer dans de bonnes conditions les agriculteurs à être employeurs, dans les référentiels de formation des BTSA et BPA par exemple, pourtant récemment rénovés, hormis l'intégration d'un module sur le droit social ».
Coordonner les efforts
Autre recommandation du CESE : « Organiser une meilleure coordination entre les acteurs territoriaux de l'emploi. » Selon lui, « une cartographie des activités des entreprises et des périodes de saisonnalité sur un territoire donné permettrait aux acteurs de l'emploi d'organiser des complémentarités de travail sur l'année ». Outre une meilleure remontée statistique des données, une telle coordination des efforts permettrait de renforcer l'information des salariés et des entreprises. « Les offres saisonnières d'emploi des différents secteurs d'activité pourraient valablement être centralisées sur un portail unique », propose-t-il notamment.
Dans ce même objectif, « la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) territoriale constitue un outil pertinent pour appréhender collectivement les questions d'emploi et de compétences sur un territoire et aider à les mettre en cohérence », estime-t-il. Et d'ajouter que, « dans les régions à forte saisonnalité, elle pourrait constituer un moyen d'identifier des complémentarités d'activités, favoriser des mobilités professionnelles locales et faciliter la montée en compétences des saisonniers et leur accès à des emplois permanents et/ou plus qualifiés, et donc mieux rémunérés ».
Par ailleurs, pour permettre aux salariés de travailler en temps partagé sur l'année dans plusieurs entreprises, dans le cadre d'un CDI, le CESE soumet l'idée de développer les « groupements d'employeurs multisectoriels » : « Actuellement, les GE demeurent dans leur quasi-totalité monosectoriels compte tenu notamment des difficultés liées à l'application des conventions collectives ou de régimes sociaux différents en fonction des activités exercées, principalement en ce qui concerne la MSA et le régime général. [...] Ces obstacles d'ordre juridique, fiscal et social au développement des GE multisectoriels devraient être levés par une harmonisation des règles visant à supprimer des différences de traitement en fonction des secteurs d'activité des entreprises ou exploitations adhérentes ».