« L'agroforesterie consiste à associer dans une même parcelle des arbres et des cultures ou des pâturages », explique David Grandgirard, enseignant à l'école d'ingénieurs Lasalle Beauvais. Le principe n'est pas nouveau, mais il avait été oublié. Il a été redécouvert, en particulier autour du bassin méditerranéen.
« D'après les mesures déjà réalisées, on sait que la culture mise en place entre les rangées d'arbres est pénalisée par rapport à des cultures traditionnelles. Le rendement est en moyenne en retrait de 20 à 30 %. De même, la production de bois est moins élevée qu'en présence d'arbres uniquement. Mais lorsqu'on additionne la production totale de biomasse, celle de la culture et celle des arbres, le bilan est positif les trente premières années », poursuit-il.
« Ces résultats ont été obtenus à l'étranger ou dans le sud-est de la France, indique Philippe Choquet, directeur de Lasalle Beauvais. Il n'existe aucune référence dans les conditions agroclimatiques du nord de la France. Or l'ensoleillement est nettement moins élevé que dans le Sud. C'est pour vérifier l'intérêt de cette pratique dans le Nord que nous avons décidé de mettre en place cette parcelle expérimentale. »
Sur ces 33 ha, ont été implantés, tous les 30 mètres, des rangées d'arbres d'une dizaine d'essences différentes de bois d'œuvre (poirier, merisier, cèdre de l'Atlas, noyers commun et hybride, érable, orme Lutèce…) et des bandes de culture de 28 mètres, la largeur du pulvérisateur.
Le conseil régional de la Picardie a apporté son concours en subventionnant 70 % de l'investissement. « Les agriculteurs qui optent pour l'agroforesterie continuent à toucher leurs DPU et peuvent bénéficier, pour l'entretien de la rangée d'arbres, d'une aide dans le cadre des mesures agro-environnementales », précise Régis Wartelle, ingénieur à la chambre régionale d'agriculture.
Dans la Région, une dizaine de projets, pour une surface de 150 à 200 ha, voient le jour.
Recréer de la biodiversité Bruno Haguet, agriculteur dans le Santerre (Somme), a implanté 13,5 hectares de grandes cultures en agroforesterie avec, tous les 30 mètres, des rangées de poiriers, pommiers, noyers sauvages, érables sycomores : au total 527 arbres. L'opération lui est revenue à 10 euros par arbre sachant qu'il a bénéficié d'une aide de la Région. « Le rendement du colza récolté l'été dernier a été moins bon que dans les autres parcelles, 37 q/ha, et le blé sera aussi pénalisé, reconnaît-il. Mais mon objectif est de recréer de la biodiversité. » |