La peur du loup s'est installée dans les Vosges où 24 brebis ont été égorgées depuis une semaine près du petit village de montagne de Ventron, même si les autorités préfèrent évoquer l'hypothèse d'un prédateur canin.
Aucune trace de loup n'a été détectée dans les Vosges depuis plus de 80 ans, si ce n'est un cadavre découvert en janvier 1995.
Mais depuis le 7 avril, l'inquiétude a saisi le village. Depuis une semaine, au rythme d'une attaque tous les deux jours, 24 brebis ont été tuées par morsure à la gorge, une dizaine ont été blessées et plus de vingt ont disparu, terrorisées par le prédateur nocturne.
Face au phénomène, qualifié d'« extrêmement rare » par la gendarmerie, les agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) des Vosges, aidés par leurs collègues spécialistes du loup, scrutent le terrain pour récolter des indices.
« Ils sont notamment à la recherche d'excréments et de poils, afin de déterminer s'il s'agit d'un chien ou d'un loup », explique le maire de Ventron, Jean-Claude Dousteyssier, alors que l'hypothèse d'attaques de lynx, régulières dans les Vosges, a été écartée.
Selon le maire, trois agents de l'ONCFS sont « visibles » sur le terrain, « mais d'autres sont également sur place dans la discrétion : ils sont cachés ».
Depuis jeudi soir, un seul troupeau a été laissé à l'air libre en guise d'appât, entouré d'un dispositif photographique à déclenchement automatique.
« Pour nous, c'est forcément des loups. On nous parle d'attaques de chiens, mais on les aurait vus ou entendus », assure Patrice Munsch, dont le troupeau a été attaqué deux fois.
Pour les éleveurs, l'impact économique de ces attaques est « important », en tout de plus de 10.000 euros, car elles surviennent au moment de l'agnelage : les brebis égorgées étaient prêtes à mettre bas.
L'hypothèse du loup, marginale au départ, a gagné en crédibilité. « Certains aspects des prédation peuvent laisser penser à un loup », convient ainsi le directeur de l'ONCFS des Vosges, Benoît Clair.
Le quotidien régional L'Alsace a publié jeudi un cliché amateur d'un animal suspect. Selon l'auteur de la photo, Pascal Perrotey-Doridant, celle-ci date du 25 mars et a été prise « à quelques kilomètres » de l'endroit où la bête a tué ses premières brebis.
Il souligne qu'il a découvert les premières traces de loup « il y a six mois » et qu'il a alors décidé d'installer un appareil photo à déclenchement automatique.
L'animal piégé par le cliché « n'a rien à voir avec un chien », affirme-t-il, convaincu que « le loup est dans les Vosges ».
Selon M. Perrotey-Doridant, l'animal, avant de s'attaquer aux brebis, avait mangé des animaux sauvages comme des cervidés, des actes attribués à des chiens errants ou des lynx.
Pour le maire de Ventron toutefois, la photo a été prise à « plusieurs dizaines de kilomètres du village » et elle permet « de reconnaître un canidé mais pas de distinguer s'il s'agit d'un chien ou d'un loup ».
Le loup, qui avait disparu en 1937 du territoire national, s'est réimplanté depuis 1992. Il est notamment présent dans les Alpes et les Pyrénées, mais aussi dans le Jura, où sa présence a été signalée l'année dernière.
L'installation dans les Vosges de cet animal capable de parcourir une quarantaine de kilomètres en une nuit serait « naturelle », selon plusieurs spécialistes, qui estiment que cet environnement « lui conviendrait parfaitement ».