« Les bons rendements et les prix en hausse redonnent du baume au cœur dans les campagnes », résume un opérateur. Mais si la moisson est terminée depuis plusieurs semaines dans le Sud, les pluies jouent les trouble-fête plus au Nord. Les rendements et la qualité sont corrects dans l'ensemble du pays, voire bons dans le Sud-Ouest. Une faible pression parasitaire explique en partie ces résultats satisfaisants, mais une moindre efficacité des désherbages est à noter.
Nord-Pas-de-Calais. La moisson est plutôt précoce cette année. Les blés sont pour l'instant corrects, aux alentours des 83 q/ha, mais avec de gros écarts (40 q/ha dans les sables, 115 q/ha dans les limons). La qualité est très bonne. Les premiers échos en orge de printemps sont aussi positifs, à 80 q/ha, avec des protéines avoisinant les 9-10 %.
Visualisez le tableau récapitulatif des chiffres de la récolte de blé tendre au 4 août 2010
Picardie. Les blés, qui ont du mal à être terminés à cause des pluies, créent un peu la surprise par rapport aux craintes légitimes après la sécheresse du printemps et les fortes températures de fin juin. Très disparates selon le type de sol et la date de semis, les rendements atteignent en moyenne 80 à 85 q/ha. C'est 10 % de moins qu'en 2009. La qualité est parfaite, tout comme celle des orges, dont les rendements de 74-78 q/ha (variétés d'hiver) et de 60-70 q/ha (printemps) sont finalement dans la moyenne.
Champagne-Ardenne. La canicule de fin de cycle n'a finalement pas été si préjudiciable aux rendements des blés, qui oscillent entre 70 et 85 q/ha, plutôt pénalisés par le sec d'avril-mai. Cela représente une baisse de 5 à 8 % par rapport à la moyenne. Là encore, la qualité est satisfaisante, même si les récentes pluies ont fait chuter les poids spécifiques (PS). Les orges de printemps sont aussi correctes (70-80 q/ha), sauf dans les terres superficielles (55-60 q/ha). Les calibrages et le taux de protéines sont dans les normes. Même constat en orges d'hiver (70-80 q/ha).
Lorraine. La récolte n'est toujours pas terminée à cause des pluies régulières dans la région. Les rendements du blé déjà moissonnés ont dans la moyenne des six dernières années, proches des 70-73 q/ha, avec une qualité satisfaisante, quoique un peu détériorée par les pluies. De la germination sur pied est parfois observée. Quelques parcelles ont été touchées par la fusariose. Les orges de printemps sont meilleures que la moyenne en Moselle (62 q/ha) et dans la Meuse (55-60 q/ha), mais décevantes en Meurthe-et-Moselle (55 q/ha), où plus de 15 % de la collecte n'ira finalement pas en débouché brassicole. Les orges d'hiver sont juste dans la moyenne, à 65-69 q/ha.
Alsace. La récolte est décevante. Les blés ont été pénalisés par la sécheresse du printemps et le coup de chaud du mois de juin. Les rendements plafonnent donc à 70 q/ha dans le Sundgau, c'est mieux en plaine (jusqu'à 95 q/ha). La qualité est correcte pour les blés rentrés avant les pluies de fin juillet. Des attaques de septoriose ont été parfois observées.
Bourgogne et Franche-Comté. Plus de peur que de mal pour les blés, qui devraient atteindre 67-68 q/ha de moyenne. C'est tout de même très moyen, surtout sur les plateaux, qui ne dépassent pas 60 q/ha. Avec une moyenne de 77 kg/hl, les PS sont satisfaisants malgré les pluies. En revanche, c'est « miraculeux » en orge de printemps par rapport à ce qui était attendu, même si la moyenne atteint péniblement les 55 q/ha. Le calibrage et les protéines sont très satisfaisants. Les orges d'hiver sont dans la moyenne quinquennale (60-65 q/ha). La qualité brassicole est correcte.
Centre. En blé tendre, les résultats sont hétérogènes et, en moyenne, en baisse (- 5 à 10 q/ha par rapport à 2009). Le sud-ouest de la zone a plus souffert du climat sec. La récolte présente de bons résultats qualitatifs. Même schéma pour le blé dur et les orges, qui disposent d'une qualité excellente et de rendements médiocres à moyens (50 à 65 q/ha en blé dur, 65 q/ha en orge d'hiver et 50 à 65 q/ha en orge de printemps).
Normandie. Les travaux ne sont pas terminés mais, pour le moment, les rendements des blés sont au-dessus des prévisions. La qualité est bonne et les PS n'ont pas encore subi de baisse. Les protéines et le calibrage des orges brassicoles d'hiver et de printemps sont irréprochables, mais les rendements ne sont pas toujours au rendez-vous (65 à 85 q/ha pour les orges d'hiver et 45-85 pour les secondes).
Ile-de-France. Là encore, les rendements souffrent de fortes disparités et sont inférieurs à 2009. Mais ils sont meilleurs que prévu et s'accompagnent d'une bonne qualité. Les blés durs sont très variables, mais sont jugés corrects, avec 65 q/ha et une bonne qualité. L'orge d'hiver n'est pas exceptionnelle en rendement (72 q/ha).
Bretagne. Il reste encore la moitié de la collecte à rentrer en blé tendre, notamment au nord-ouest. C'est une bonne surprise pour les semis les plus précoces, qui s'en sortent mieux que ceux de décembre. La bonne fertilité des épis des orges d'hiver a permis d'avoir un rendement moyen de 65 q/ha et des PS supérieurs à 66 kg/hl.
Pays de la Loire. Le nord-ouest de la région a souffert d'un déficit hydrique en avril et mai. Ailleurs, le manque d'épis par mètre carré a été compensé par une meilleure fertilité. Les résultats sont inférieurs de 10 q/ha comparés à ceux de 2009. Avec une bonne qualité, les blés durs varient de 50 à 85 q/ha en fonction de l'irrigation. Les rendements des orges d'hiver sont médiocres à bons. Celles de printemps ont souffert des conditions de fin de cycle.
Poitou-Charentes. S'il n'y a aucun problème de qualité sur tous les blés, les rendements sont en baisse, surtout en terres légères. En moyenne, il manque au moins 10 q/ha. Les orges de printemps ont été affectées par le printemps sec. Quant aux brassicoles, elles sont plutôt chargées en protéines.
Auvergne et Limousin. Dans le Puy-de-Dôme, c'est une bonne année en blé. Les rendements sont hétérogènes (de 50 à 100 q/ha) mais la moyenne s'établit à 75 q/ha, soit 10 à 15 de plus qu'une année classique. Dans l'Allier et dans le Limousin, la récolte est décevante (50 à 55 q/ha). Des inquiétudes se portent sur les 25 % de surfaces restant à récolter. Dans la région, des problèmes de mycotoxines sont à noter sur les variétés sensibles derrière le maïs en non-labour. Pour les orges d'hiver, c'est aussi une mauvaise année, avec 10 q/ha de moins, à 50 q/ha et des PS de 62 à 66 kg/hl.
Rhône-Alpes. C'est une bonne campagne dans l'ensemble, malgré une petite déception dans l'Ain quant au rendement du blé tendre et aux taux de mycotoxines qui flirtent parfois avec la norme. La qualité est très bonne. Les blés durs (58 q/ha) et les orges (56 à 66 q/ha) ont bien rendu et présentent une bonne qualité (93 % de calibrage).
Languedoc-Roussillon et Paca. Les rendements en blé dur sont hétérogènes mais les résultats sont dans la moyenne autour de 35 q/ha, grâce notamment à l'assolement diversifié. En revanche, la qualité est un peu décevante à cause d'un manque d'azote (80 à 82 kg/hl de PS et 12,5 à 13 % de protéines). Dans les Alpes-de-Haute-Provence, le taux de mitadinage est aussi assez important. Des levées tardives de folles avoines sont aussi à noter.
Midi-Pyrénées. Avec 47 à 50 q/ha de moyenne et 86 kg/hl de PS, la récolte de blé dur, qui s'est faite sans pluie, a été bonne. Les protéines ont du coup été un peu diluées, à 13,5 %. Une légère présence de mitadinage et de moucheture est à noter, mais sans alerte. C'est aussi une bonne année pour le blé tendre (60 q/ha) et l'orge d'hiver (62 à 65 q/ha). Les variétés hybrides se sont distinguées avec 10 à 15 q/ha de plus cette année par rapport aux autres grâce à un bon remplissage des grains.
Aquitaine. Avec 7-8 q/ha de plus qu'une année classique, les rendements de blé tendre sont bons et atteignent 65 à 68 q/ha en moyenne. Mais si les PS sont très bons (autour de 80 kg/hl), les protéines sont un peu diluées (11 à 12 %). En orge d'hiver, le rendement est de 62 q/ha, soit moins bien qu'une année classique en Dordogne.
Le marché du blé tendre sous haute tension
Au 28 juillet, la récolte française de blé tendre était estimée à 34,6 millions de tonnes (Mt) par Offre et demande agricole, soit une chute de 1,9 Mt par rapport à 2009. En cause, la baisse des rendements de 9 %, à 70 q/ha (contre 77 q/ha l'an dernier).
Ce recul de production est sans commune mesure comparable à celui de la Russie, troisième exportateur mondial, soumise depuis des semaines à la canicule. La collecte y est annoncée catastrophique, à seulement 40-45 Mt (60 Mt en 2009). Ce qui a mis le feu aux poudres sur le marché des céréales, qui subit un retournement spectaculaire depuis début juillet : + 40 % en un mois pour le cours du blé ! Face à la grande volatilité des cours, acheteurs et vendeurs restent sur la défensive. Les prix d'acompte fixés par certaines coopératives oscillent entre 100 et 140 euros/t pour un blé meunier standard. Beaucoup vont être revus courant août ou en septembre selon l'évolution des cours. « Le marché est surcoté et très spéculatif. Les fondamentaux ne suffisent pas à expliquer les mouvements de hausse, estime un responsable céréales de coopérative. Or la baisse de la production en Russie est compensée par les stocks américains importants et la bonne récolte annoncée dans l'hémisphère Sud. » Pour Virginie Ciesla-Maudet, analyste technique chez Assertis, « les cours devraient matérialiser un sommet majeur en août. Une vague baissière pourrait se développer ensuite à court ou moyen terme ». |
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