Plus de 1.500 tracteurs sont attendus jeudi dans la capitale, pour la manifestation organisée par la FNSEA et Jeunes Agriculteurs (JA). Les forces de l'ordre en attendraient 2.000, soit le double que ce que prévoyaient les syndicats ! Dès l'aube, les différents convois rejoindront le boulevard périphérique, puis convergeront vers la porte de Vincennes, avant de rejoindre la place de la Nation.
S'ils arrivent plein de détermination, « l'objectif est de gêner le moins possible les Parisiens », assurent les organisateurs. D'où un maximum de communication en amont. Porter avec force ses revendications sans se mettre à dos la population est le défi récurrent des grands rassemblements nationaux. L'histoire des manifestations agricoles montre à quel point la manière dont l'opinion public perçoit l'évènement compte dans sa portée.
1982 : montrer sa force politique
En 1982, le syndicalisme majoritaire veut peser dans les discussions européennes sur les prix agricoles et en profite pour montrer sa puissance à la très contestée ministre de l'époque, Edith Cresson. Ils seront 100.000 à manifester à Paris, le 23 mars. « Une démonstration de force doublée d'une opération de charme », commentait à l'époque la journaliste Christine Ockrent, au journal télévisé du soir. Le président de la FNSEA d'alors, François Guillaume, témoigne d'un enjeu toujours d'actualité : « Gagner la sympathie des Parisiens, si souvent résignés à subir ce genre de défilé sans même en connaître le motif alors qu'ils sont, en certains cas, victimes de débordements spontanés ou provoqués, nous incitaient à informer la population des raisons de notre colère et à veiller qu'aucun incident ne vienne gâcher notre démonstration (1). Et l'ancien leader syndical de raconter comment, en tribune, il lança à leur adresse cette menace empruntée au poète Sully Prudhomme : « Le laboureur m'a dit en songe, frère, fais ton pain, je ne te nourris plus ! »
1991 : l'appel aux villes
L'année 1991 marque un tournant en matière d'action syndicale. A l'appel de la FNSEA, qui organise « les Dimanches de Terre de France », 300.000 ruraux débarquent à Paris pour interpeller sur la désertification des campagnes. En tribune, l'Aveyronnais Raymond Lacombe, président de la FNSEA, clamait à ses troupes : « Vous êtes venus à la rencontre de la population parisienne pour lui dire que la France rurale veut vivre ! Que ces hommes et ses valeurs sont indispensables à l'équilibre économique et social de notre pays ! » Puis, le bras levé au-dessus du pupitre : « J'en appelle aux gens des villes de prendre cette main tendue aujourd'hui, et de la croiser avec nous ! » Le message était alors moins politique que social, avec des slogans adressés directement des campagnes qui se vident aux villes : « L'un sans l'autre, nous n'existerons pas ! » « Paysans en détresse, Parisiens avec nous ! » Un premier pas vers le monde citadin et un changement d'approche pour éviter le repli sur soi, selon les observateurs. Les participants se rappellent des applaudissements descendant des balcons à leur passage...
2015 : l'expression de la colère
Les agriculteurs recevront-ils le même accueil lors de la journée du 3 septembre ? Le contexte est bien différent. L'heure n'est plus au choc frontal contre une ministre détestée (Edith Cresson, en 1982) ou à l'appel aux bonnes volontés des urbains, comme en 1991. Et les agriculteurs se sentent de plus en plus isolés dans la société. « On sent les gens désespérés, confie-t-on à la FDSEA de la Nièvre. Certains ne s'intéressent plus aux manifestations, d'autres ne veulent y aller que pour casser du bois. C'est un mouvement de colère plus qu'une action syndicale ». « Les troupes sont très remontées », rapporte encore un élu de l'Ile-de-France. Mais les consignes passées dans les convois sont strictes : « Pas question de casser ». Il reste à savoir si les annonces promises par le gouvernement calmeront les ardeurs des plus irrités. Déjà en route, certains préviennent : « On ne monte pas à Paris pour rien. Si on n'obtient pas ce que l'on veut, pas sûr qu'on redescende facilement... »
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(1) Un paysan au cœur du pouvoir, 2014, Editions De Borée.
contre Hollande
jeudi 03 septembre 2015 - 06h54
les paysans de droite vont manifester contre "le gouvernement de gauche". C'est bientot les régionales "les Républicains" tire les ficelles. Comme d'hab.... et les petits moutons ...eh bien ils suivent le guide spirituel !