Déficit d'image, désengagement des établissements publics ou encore environnement industriel et de recherche et développement affaibli : l'Irstea (1) pointe sans tabou les faiblesses du secteur des agroéquipements. Dans un rapport remis le 12 janvier 2015 à Stéphane Le Foll, Emmanuel Macron et Geneviève Fioraso, Jean-Marc Bournigal, président de l'Irstea, analyse les forces et faiblesses de ce secteur et formule neuf recommandations pour y accompagner l'innovation et son développement.
Si le rapport flatte le marché national, certes dynamique et diversifié, ainsi qu'une industrie montrant une grande capacité d'adaptation, un réseau de distribution et de conseil dense et un enseignement supérieur de qualité, il est en revanche sévère vis-à-vis des stratégies nationales. Et la première concerne l'enseignement et l'orientation. En effet, l'Irstea souligne un déficit d'image et de visibilité conduisant à 5.000 à 7.000 emplois non pourvus pour la fabrication et la distribution, et autant pour les entreprises des territoires (en particulier pour les emplois saisonniers).
Mais là où le bât blesse, c'est que l'Irstea critique son propre désengagement parmi les autres établissements publics de recherche et d'enseignement supérieur et les instituts sur ce sujet des agroéquipements. Il tacle aussi la diminution des effectifs en conseil en machinisme, notamment dans les chambres d'agriculture. Le tout « se traduisant par des lacunes scientifiques et techniques sur certains domaines de l'agroéquipement », et mettant en péril la continuité recherche-développement-transfert industriel.
La « désindustrialisation » du pays a créé des lacunes
Toujours selon le rapport, Jean-Marc Bournigal souligne le handicap de la France, par rapport à l'Italie par exemple, de ne pas « chasser en meute sur les marchés à l'exportation », c'est-à-dire que les petites entreprises françaises travaillent encore peu ensemble, sous forme de cluster. Selon l'Irstea, les mécanismes fiscaux conduisant à une surmécanisation et pesant sur les charges des exploitants ont aussi des répercussions pour les marchés du neuf et de l'occasion.
Enfin, dernière stratégie critiquée, et non des moindres, la mise en place de dispositifs d'aide à l'innovation, peu lisibles et méconnus de la filière. L'éligibilité des agroéquipements parmi les pôles de compétitivité n'est par exemple mentionnée nulle part. Plus généralement, l'Irstea critique le manque de collaboration efficace entre recherche, universités et entreprises, soit « une des raisons de la force du secteur des agroéquipements en Allemagne ».
Neuf recommandations
Pour redonner du souffle au secteur des agroéquipements, l'Irstea établit donc neuf recommandations. Il souhaite ainsi voir préparée l'agriculture future à partir de conceptions d'équipements de la transition agroécologique, robotiques et numériques. Il propose en outre d'encourager l'innovation et de renforcer les moyens du secteur. Un programme en guise de recommandations pour changer de cap.
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(1) Irstea : Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture.