Une étude rendue publique le 10 janvier 2012 explique pourquoi l'objectif de « bon état de qualité des eaux » visé pour 2015 en France par la directive-cadre ne sera probablement pas atteint, et donne des pistes.
Ce rapport se fonde sur une approche plus sociologique que technique ou économique avec une enquête auprès de plus de 200 personnes réparties sur six bassins versants de taille et de localisation très variées. Cette mission des conseils généraux de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux et celui de l'environnement et du développement durable (CGAAER et CGEDD), a été mandatée par les autorités ministérielles compétentes (DGALN/DEB, DGPR, DGPAAT).
Selon le rapport, « l'accord sur ce qu'il faut mesurer, quand et comment, n'existe que rarement ; aucun système d'évaluation n'est mis en place. Les diagnostics de territoires et d'exploitation sont aléatoires et partiels, occultant trop souvent leur dimension économique. Les actions d'amélioration de la qualité de l'eau sont fragmentaires et peu pilotées. Elles font l'objet d'enjeux de pouvoir et sont soumises à des pressions incontrôlées et incohérentes entre elles. »
La mission a noté quatre principales explications de fond à ces insuffisances :
- La faiblesse du « jeu collectif » (pour les diagnostics, plans d'action, évaluations, sanctions). Les acteurs agricoles sont rarement présents dès l'engagement de la réflexion et, de ce fait, la contestation des expertises, des méthodes, des résultats est courante ;
- L'hésitation, voire le freinage sur certains sites, des organisations professionnelles agricoles, qui, considérant que ce sujet n'est abordé qu'environnementalement, restent centrés sur un discours économique (productivité, rendement...) ;
- L'État est censé porter la finalité des objectifs de la DCE, mais il ne parvient pas à coordonner et à intégrer ses diverses politiques publiques en vue d'un véritable aménagement durable des territoires ;
- Les exploitants agricoles, dans l'ensemble, sont soumis à des injonctions contradictoires.
La mission préconise de repenser au niveau des territoires tout le dispositif de mise en œuvre de la DCE, et principalement que :
1. toute démarche localisée (analyse des enjeux, diagnostics et plans d'action territoriaux, bilans et évaluations) soit l'objet d'une concertation entre toutes les parties prenantes ;
2. les représentants de la profession agricole, de leur propre initiative ou à défaut fortement incités par les pouvoirs publics, s'inscrivent résolument dans des démarches de développement durable ;
3. le changement des pratiques agronomiques, voire des modèles de développement de l'agriculture, puisse avoir lieu dans des conditions permettant d'accéder à un nouvel équilibre économique des exploitations individuelles. A cet effet, d'une part, les travaux pour objectiver l'impact des pratiques sur les masses d'eau doivent se poursuivre et être diffusées. D'autre part, des mesures financières doivent être réinventées ou adaptées pour rémunérer le service environnemental attendu, avec l'ingénierie d'accompagnement nécessaire à la prise en compte des situations locales ;
4. l'État, porteur des objectifs de la DCE, clarifie et distingue ses rôles principaux, à tous niveaux.
Téléchargez l'étude de cas publiée par le ministère de l'Agriculture :