Greenpeace a publié le 16 juin 2015 un rapport détaillant les résultats de tests réalisés sur des échantillons de sol et d'eau de ruissellement en provenance de vergers de pommes situés dans douze pays européens. « Inédite de par son échelle géographique et le choix de tester uniquement des vergers de pommes en agriculture conventionnelle, l'analyse révèle que les deux tiers de ces échantillons contiennent des résidus de pesticides », souligne l'organisation. En réaction, le collectif Sauvons les fruits et légumes de France évoque un « pseudorapport » bâti sur l'« ignorance agronomique » qui traduit bien l'ensemble des réactions parvenues à la rédaction.
« Les résultats soulignent également que 70 % des pesticides identifiés présentent une toxicité très élevée pour les humains ou la biodiversité. Sur les 85 échantillons prélevés en avril 2015, 53 contenaient des pesticides », ajoute encore Greenpeace.
« Ces tests prouvent la présence de cocktails de pesticides dans les vergers de pommes qui nourrissent la très grande majorité des Européens. Les conséquences pour la santé et l'environnement sont connues et alarmantes : il est largement temps de mettre fin à cet usage massif des pesticides qui dure depuis bien trop longtemps », déclare Anaïs Fourest, chargée de campagne pour l'agriculture à Greenpeace.
En France, les prélèvements ont été effectués dans des vergers de fournisseurs des principales enseignes de la grande distribution (Auchan, Carrefour, Casino, Leclerc, Intermarché et les Magasins U) et dans trois des plus importantes régions productrices de pommes : Limousin, Provence-Alpes-Côte d'Azur et Midi-Pyrénées.
Solutions alternatives
Ces tests révèlent notamment la présence de chlorpyrifos dans quatre échantillons de sol sur six prélevés. « Ce pesticide est particulièrement dangereux et certaines études montrent que l'exposition à ce produit peut causer des troubles de l'attention et du développement intellectuel chez les enfants », informe Greenpeace.
Le rapport dresse aussi une liste de solutions alternatives permettant de lutter contre les principales maladies et ravageurs du pommier sans recourir à des pesticides chimiques de synthèse.
« Le secteur de la grande distribution française, étant donné son poids, peut et doit jouer un rôle positif pour faire évoluer les pratiques agricoles dans le sens d'un plus grand respect de l'environnement et du bien-être des agriculteurs », estime Greenpeace qui a lancé, le 27 mai dernier, la course au zéro pesticide entre Auchan, Carrefour, Casino, Leclerc, Intermarché et les Magasins U. L'organisation positionne ces distributeurs en fonction des moyens qu'ils mettent en œuvre pour atteindre, d'ici à 2017, certains objectifs visant à éliminer les pesticides de la production de notre alimentation, à commencer par les pommes et les pommes de terre, tout en soutenant les agriculteurs qui s'engagent dans cette voie.
« Coucou fais-moi peur ! » (collectif Sauvons les fruits et légumes de France)
« Puisque les producteurs sont des incompétents notoires depuis des décennies, comme semble le dire Greenpeace, leurs militants écologistes n'ont qu'à devenir agriculteurs », commente Bernard Géry, maraicher et porte-parole du collectif Sauvons les fruits et légumes de France, dans un communiqué du 16 juin.
« Pourquoi attaquer les producteurs français qui sont pionniers en matière environnementale par rapport à leurs voisins ? Le pseudorapport de Greenpeace sur les pommes et les pesticides vise à nuire aux producteurs de nos terroirs. »
« Greenpeace, c'est 1.500 salariés dans 30 pays et un budget global de 293 millions d'euros en 2013 consacrés uniquement à des actions de communication. L'ONG mène une action de marketing sur le dos des arboriculteurs français. Greenpeace, spécialiste du fundraising, cherche des donateurs dans notre pays ! Les pesticides sont une cause facile. Greenpeace n'a aucune responsabilité économique et sociale : il est aisé de dénoncer et de calomnier depuis le 10e arrondissement de Paris en ignorant tout ce qui est déjà fait dans l'agriculture. »
« Les marchands de peur de Greenpeace montrent leur ignorance agronomique en réalisant des analyses au mois d'avril sur le sol et l'eau, bien avant la floraison, alors que les fruits ne sont pas encore formés ! En tirer des conclusions sur les fruits est une aberration agronomique qu'un enfant de CP n'oserait pas dire », poursuit Bernard Géry.
Un « rapport bidon » (ANPP)
Pour la Coordination rurale, le rapport de Greenpeace est extrêmement insultant pour les arboriculteurs qui « ont depuis longtemps cherché et mis en place des techniques alternatives pour se passer de produits phytosanitaires ». « Les fruits français sont sains. Nous n'avons pas à rougir des pommes proposées aux consommateurs », ajoute encore le syndicat agricole.
Pour l'Association nationale pommes poires (ANPP), il s'agit d'un « rapport bidon ». « Greenpeace montre son ignorance agronomique en préconisant des solutions alternatives dont la quasi-totalité est déjà mise en place depuis... plus de 20 ans par les producteurs ! Et certaines vont même au-delà des préconisations de Greenpeace... », appuie l'association.
Pour éviter un nouveau rapport biaisé, l'ANPP propose d'ailleurs à Greenpeace de venir visiter un verger écoresponsable et d'apprécier, sur place, l'engagement des pomiculteurs pour une production toujours plus respectueuse de l'environnement et des consommateurs.