Publié le lundi 15 octobre 2012 - 18h38
La France plaide pour la constitution de réserves alimentaires stratégiques qui puissent être débloquées en cas de pénurie pour apaiser les prix mondiaux, mais se heurte à des réticences, reconnaît le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll.
« Certains pays croient encore que le marché peut s'autoréguler », note le ministre français qui va animer une table-ronde ministérielle sur la transparence des marchés agricoles, mardi à Rome, à l'occasion de la Journée mondiale de l'alimentation au siège du Fonds des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation (FAO).
L'Agence France-Presse (AFP) lui a posé trois questions.
1. Quels sont les sujets essentiels que vous voulez évoquer ?
« J'en vois trois : améliorer la transparence des marchés agricoles, grâce à des réunions informelles comme celle-ci qui permettent d'échanger et de communiquer ; traiter des stocks alimentaires d'urgence prépositionnés dans les pays vulnérables afin de lutter contre la pénurie et d'éviter les crises, dans le droit fil de ce qu'avait décidé le dernier G20 (en juin 2011). Avec aussi un objectif de lutter contre le gaspillage car, si dans les pays développés, on perd 25 à 30 % de ce qui est offert à la consommation, dans les pays en développement, c'est 25 à 30 % de ce qui est produit. Il y a donc là un enjeu de stockage, de transformation et d'organisation des marchés locaux à revoir, au service d'une agriculture familiale qui soit aussi plus durable et plus adaptée aux écosystèmes. Enfin, il faut évoquer les politiques de développement et notamment les questions foncières, avec les risques qui pèsent sur les achats de terres : il faut faire progresser un droit qui pérennise l'activité agricole familiale. »
2. A côté des stocks prépositionnés se pose la question des stocks dits « de réserve stratégique » pour réguler les marchés, qui eux ne suscitent pas la même adhésion des partenaires.
« On est là sur des problèmes plus difficiles, plus lourds en termes politiques à l'échelle mondiale, mais la France porte toujours cette idée. En cas de gros problème sur un marché, si vous n'avez pas de réserve pour compenser les pertes d'offre, vous avez une très forte augmentation des prix. Donc, plus vous êtes en capacité de compenser le manque d'offre, plus vous avez des chances de pallier la volatilité des prix. Certains pays n'en ont pas envie encore, mais c'est un sujet qui doit être géré et coordonné à l'échelle mondiale. Il y a encore des pays qui croient que le marché peut s'autoréguler... moi j'y crois avec modération. Et je crois surtout qu'on a besoin d'outils. »
3. La France avait proposé une réunion du Forum de réaction rapide (FRR) créé par le G20 (les vingt économies les plus développées), mais n'a pas été suivie. Y voyez-vous un manque de volonté politique ?
« Ce cadre formel était pensé par le G20 pour des situations de crise majeure. Nos partenaires ont jugé qu'on en n'était pas là, mais l'essentiel est de se parler, que les idées diffusent. On est finalement sur un mode encore plus large qu'un G20, avec 34 pays représentés, dont 20 ministres qui appartiennent en partie au G20 mais pas seulement - et des délégations à haut niveau, comme les Etats-Unis. Finalement, beaucoup de pays se sont intéressés à notre initiative et ont répondu à notre sollicitation. »
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