L'Inde a rejeté le mercredi 4 décembre 2013 un compromis en discussion à la réunion ministérielle de l'OMC sur l'île indonésienne de Bali, rendant encore plus improbable la conclusion d'un accord visant à relancer les négociations sur la libéralisation des échanges mondiaux, paralysées depuis douze ans.
« Les clauses concernant les restrictions (aux subventions agricoles, ndlr) ne peuvent pas être acceptées sous leur forme actuelle » : il aura suffi d'un discours de trois minutes au ministre indien du Commerce, Anand Sharma, pour confirmer les craintes que le compromis sur la table à la réunion ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ne réussirait pas à faire plier New Delhi.
L'Inde, à la tête des 46 pays en développement du « G33 », demande à pouvoir accroître ses subventions aux produits agricoles afin d'aider les fermiers et nourrir à bas prix les plus pauvres, mais cela est actuellement sévèrement limité par l'OMC, car considéré comme une forme de dumping.
New Delhi, en difficulté à l'approche d'élections nationales, entend mettre en œuvre un programme visant à offrir à prix artificiellement bas des denrées alimentaires de base à plus de 800 millions de pauvres.
Les Etats-Unis, fervents opposants, ont proposé un compromis qui consisterait à offrir une « clause de paix » de quatre ans, selon laquelle aucune sanction ne serait recherchée contre les pays qui dépassent le plafond de subventions pour un programme de sécurité alimentaire. Mais New Delhi et le G33 rejettent une période déterminée à l'avance, préférant qu'une telle exemption coure « jusqu'à ce qu'une solution permanente négociée soit convenue », a expliqué M. Sharma.
« Pour l'Inde, la sécurité alimentaire n'est pas négociable », a martelé le ministre, assurant qu'il s'agissait de « la décision finale » de Delhi. « Les déséquilibres historiques des règles du commerce mondial doivent être corrigés afin d'assurer un ordre juste et équitable », a-t-il asséné, soulignant que « l'agriculture soutient des millions de petits paysans ».
La fin de non-recevoir opposée par New Delhi a jeté un froid sur les discussions de Bali qui tentent de réanimer les négociations lancées en 2001 à Doha afin de réduire les barrières aux frontières et ainsi doper l'économie mondiale. « Je suis de nature optimiste mais aujourd'hui je dois avouer que je suis quelque peu maussade », a réagi le commissaire européen au Commerce, Karel de Gucht, accusant visiblement le coup après la « bombe » indienne.
« Une solution n'est pas impossible mais à condition que l'Inde fasse preuve de la flexibilité nécessaire », a-t-il souligné avec une franchise peu habituelle pour ce genre de rencontres. Le commissaire a averti qu'un échec à Bali « ferait vaciller les fondations même de l'OMC », « plaçant sous respiration artificielle le système de règles de l'OMC ».