La Pac coûte cher au contribuable. Elle ne bénéficie qu'aux « gros ». Elle favorise l'agriculture intensive et affame le tiers-monde... Autant d'idées reçues que quelques experts du CGAAER (1) atténuent ou infirment dans une deuxième « controverse » publiée le 14 mars sur le site du ministère de l'Agriculture.
La Pac coûte cher au contribuable. Les détracteurs de la Pac lui reprochent souvent de dévorer la moitié du budget européen pour ne bénéficier qu'à une poignée de privilégiés. Les experts rappellent que la Pac est la seule politique commune. « Au regard de la dépense publique européenne et au niveau des Etats membres, l'agriculture constitue une exception par rapport aux autres politiques publiques (éducation, sécurité, santé...) ». La Pac représente moins de 1 % de l'ensemble des dépenses publiques communes et nationales. En outre, les fonds agricoles consacrés au développement rural (deuxième pilier de la Pac) répondent à des objectifs d'aménagement et d'environnement qui dépassent l'agriculture. Certaines de ses enveloppes ne sont d'ailleurs pas du tout fléchées sur les secteurs agricoles.
La Pac est injuste. « L'injustice qui caractérisait la Pac est une critique qui ne porte que sur une partie seulement de ses crédits : les paiements directs du premier pilier. Cette critique donne aussi à penser que la Pac aurait pour seul bénéficiaire l'agriculteur qui reçoit les aides Pac. » Or, « les industries agroalimentaires sont aussi plus ou moins directement bénéficiaires des aides Pac ». Les consommateurs aussi en bénéficient en assurant un prix raisonnable aux produits et en garantissant la sécurité sanitaire des approvisionnements. A la critique qui veut la Pac bénéficie aux plus « gros », l'explication est en partie historique. Toutefois, les experts pointent du doigt deux éléments qui montrent que la répartition des aides n'est pas complètement alignée sur la dimension économique des exploitations. D'abord, des plafonds d'aides ont été mis en place au fil des réformes. La réforme de 2008 a procédé à une première convergence des aides qui s'accélère avec la réforme de 2013. Réforme qui efface progressivement les références historiques qui expliquent la grande variété des niveaux d'aides directes. De plus, toutes les productions ne sont pas concernées par les aides directes (ex. : viticulture, arboriculture, porcs, volailles...). Si l'on entend souvent qu'au sein de l'UE, 20 % des bénéficiaires de la Pac perçoivent 80 % des subventions, en France, 20 % des exploitations professionnelles bénéficient de 47 % des aides européennes du premier pilier (aides directes).
La Pac favorise l'agriculture intensive. Les experts avouent que c'était exact il y a quarante ans mais que ce n'est plus le cas aujourd'hui. Un premier virage antiproductiviste a été abordé dans les années 1990 puis renforcé en 2003 avec l'introduction des aides découplées de la production (DPU) et la « conditionnalité » qui lie les aides directes au respect de certaines règles environnementales. La réforme de 2013 va beaucoup plus loin, avec un paiement vert européen et l'apologie de la double « performance économique et environnementale » des exploitations agricoles. « A chacune des étapes des réformes engagées depuis cinquante ans, la Pac entraîne une évolution importante des pratiques des agriculteurs, sans abandonner les exigences de qualité », affirme l'étude.
La Pac affame le tiers-monde. Faux, là encore. La Pac a été accusée de nuire au développement de l'agriculture des pays pauvres. Les aides versées aux agriculteurs et les subventions à l'exportation perturberaient les marchés. Et les exportations européennes feraient une concurrence déloyale aux agriculteurs du tiers-monde. « Cette accusation recouvre plusieurs effets présumés de la Pac », souligne le rapport, qui rappelle par ailleurs que les mécanismes pointés du doigt ont depuis été supprimés. Il rappelle également que l'UE est le premier importateur mondial de produits agricoles des pays en développement. Et que les besoins alimentaires de ses voisins méditerranéens pourraient très rapidement changer la donne.
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(1) Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux du ministère de l'Agriculture.
Lire également :
- Idées reçues sur l'agriculture : une « controverse » en cinq épisodes qui commence par la sécurité alimentaire (CGAAER) (17 février 2014)
le premier beneficiaire de la PAC, c'est l'ETAT
lundi 17 mars 2014 - 23h59
Le principal bénéficiaire de la PAC, c'est l'Etat qui récupère 40 % des "aides" au profit de la MSA (que deviendrait le budget de la MSA sans la PAC?) et au moins 20% au titre de l'impôt sur les revenus... Donc 60% au bas mot. A cela, le maintien de l'emploi de nombreux fonctionnaires chargés de l'instruction et du suivi de cette politique! Au total donc une véritable bouée de sauvetage pour le MINISTERE DE L'AGRICULTURE, sans parler du pouvoir de nuisance qu'elle lui confère.