Les ONG environnementales vont à l'avenir devoir se compter pour conserver voix au chapitre, selon de récents décrets contestés par certaines de ces organisations qui craignent de devenir inaudibles.
Pesticides, eau, santé, air, ondes, déchets : les associations environnementales devront, outre compétence et indépendance financière, afficher au moins 2.000 membres pour pouvoir siéger dans les multiples instances consultatives où sont examinées à la loupe les politiques publiques.
Ce seuil, qui s'appliquera en 2015, « met dehors toutes les associations d'experts, celles dont l'objectif n'est pas de faire du nombre mais d'apporter une contestation technique », fustige l'ex-ministre de l'Environnement Corinne Lepage, vent debout contre ces décrets parus le 13 juillet 2011 au Journal officiel.
« Consternées », une trentaine d'ONG ont écrit de leur côté à la ministre de l'Ecologie, Nathalie Kosciuscko-Morizet, pour demander « l'abrogation de ces textes qui sont à l'opposé de ce que fut l'esprit du Grenelle ».
Des ONG comme le Cniid (spécialisé sur les déchets), Inf'OGM, Générations futures (anti-pesticides) ou le Réseau environnement santé « n'auront aux termes de ce texte plus le droit de participer aux instances officielles », selon ce courrier.
« Si nous siégeons dans des commissions, c'est parce que le ministère nous a identifiés comme une organisation experte sur des sujets comme les pesticides », observe-t-on chez Générations futures. « On pourrait très bien se poster à la sortie des facs et demander une adhésion symbolique aux étudiants, mais est-ce qu'on serait plus représentatifs pour autant ? », s'interroge sa chargée de mission Nadine Lauverjat.
« Les associations ont toutes jusqu'au 31 décembre 2014 pour s'adapter », a répondu NKM via son blog personnel. « Cela va permettre au tissu des ONG d'anticiper et de s'organiser (en fédération par exemple) » et de « consolider la démocratie écologique » née du Grenelle, a-t-elle fait valoir.
L'ONG Robin des Bois (700 adhérents), tout en critiquant aussi le seuil « arbitraire » des 2.000 membres, reconnaît les aspects « positifs » de ce cadre.
« Le fait que les associations seront astreintes à plus de transparence financière, c'est bien. Pourquoi ne le seraient-elles pas alors qu'elles l'exigent des entreprises ? », lance son président Jacky Bonnemains.
« Ce décret n'est pas parfait, mais c'est une étape importante », estime également la fédération France Nature Environnement (FNE), qui, forte de ses 3.000 associations affiliées, indique représenter 800.000 adhérents, apparaît aux yeux des « petites » associations comme un grand bénéficiaire des mesures.
Les nouvelles règles du jeu permettront d'éliminer « des associations faux-nez » qui masquaient sous un vernis vert des motivations plus partisanes – politiques ou économiques –, selon Michel Dubromel, vice-président de FNE.
Et les ONG se rejoignent sur l'importance de conserver une présence forte dans ces instances certes consultatives mais « où on est en contact direct avec le ministère, et les lobbies comme l'industrie chimique », insiste Nadine Lauverjat, de Générations futures.