Les produits chimiques « verts » sont pénalisés par leur coût. Selon les intervenants internationaux qui ont débattu lundi à Paris lors du congrès européen de la chimie du végétal, ces nouveaux produits s'imposeront seulement s'ils apportent un plus. Les soutiens politiques ont également été évoqués.
D'ici à 2020, l'industrie des emballages pourraient utiliser 45 % de produits verts contre 8 % aujourd'hui. Le secteur de la construction pourrait passer de 5 % à 42 %. L'automobile arriverait à 35 % contre 4 % actuellement. Le bond le plus brutal est attendu dans le domaine de la santé qui n'utilise que 1 % de produits naturels, contre 35 % d'ici à dix ans, selon une étude présentée par Bernard Hasson, directeur de Specialchem.
Mais derrière ces potentiels de développement excitants se cache sur le terrain la difficulté d'imposer ces nouveautés en raison de leur prix élevé. Même si 20 % des entreprises se disent prêtes à payer un bonus de 5 % de plus pour des produits plus naturels (selon la même étude).
L'exemple des biolubrifiants est édifiant. Alors que techniquement il serait possible de remplacer 90 % des lubrifiants actuels par des produits végétaux, la part de marché des lubrifiants écologiques n'est que de 2 % en Europe, avec 100.000 t par an, et les débouchés semblent stagner.
« Pourtant, à long terme, les débouchés pourraient atteindre 1,5 million de tonnes annuels, estime Rolf Luthers, de la société spécialisée Fuchs. Il faut justifier le surcoût par une valeur ajoutée en termes de durée de vie ou d'efficacité. Un autre problème auquel nous sommes confrontés est la préférence des pouvoirs politiques pour l'utilisation énergétique des productions végétales (biocarburants, ndlr.) ».
« Il faut essayer de sortir du cercle vicieux “prix élevé = pas de demande = pas de production = prix élevé”, explique Maira Magnani, du pôle de recherche de Ford en Allemagne. Pour les voitures, l'utilisation de végétaux peut permettre de diminuer le poids des véhicules. Une baisse de 10 % du poids peut permettre une réduction de 3 à 5 % des émissions de CO2 de la voiture selon les motorisations. »
Les produits verts peuvent faire valoir leur innocuité pour la santé, dans le cas des emballages destinés à entrer en contact avec les aliments notamment. Le remplacement des phtalates et du bisphénol A est évoqué.
« Les consommateurs sont de plus en plus nombreux à réclamer des shampooings sans sulfate, sans PEG, sans dioxane... assure Marie-Pierre Labeau, chez Rhodia. Aussi, les substances actives dans les produits cosmétiques sont parfois écotoxiques. La chimie du végétal peut permettre de relever ces défis. »