A l'occasion de son arrivée en France, l'organisation non gouvernementale (ONG) d'origine allemande Foodwatch a livré, le 6 mai à Paris, plusieurs exemples de « pratiques légales mais pas légitimes » de l'industrie alimentaire. Une première pétition, visant une viande de dinde vendue par l'enseigne E. Leclerc, a été lancée.
« Contraindre l'industrie alimentaire à dire toute la vérité au consommateur » : telle est la mission que s'assigne Foodwatch, résume Ingrid Kragl, directrice de l'information pour la France. Selon elle, l'industrie agroalimentaire use et abuse de « pratiques légales mais pas légitimes » qui s'apparentent à des « ruses ». Objectif : dissimuler au consommateur – grâce à une présentation marketing flatteuse – que le produit qu'il achète contient moins de matières premières nobles qu'il ne l'imagine. Cinq exemples :
- un blanc de dinde Leclerc « 100 % filet » qui n'est en fait composé que de 84 % de viande (ce qui est d'ailleurs précisé sur la liste des ingrédients),
- une soupe Maggi (Nestlé) bœuf-carotte qui contient, pour tout ingrédient carné, 1,1 % de « jus de cuisson de viande de bœuf » et 5,5 % de carottes (mais 65 % de féculents et légumes),
- une vinaigrette Puget (Lesieur) à l'huile d'olive vierge extra, au vinaigre balsamique et aux tomates séchées qui ne contient en fait que 20 % d'huile d'olive vierge extra et 1 % de tomates séchées,
- un yaourt bio aromatisé aux fruits rouges Vrai (Triballat Noyal) qui contient, comme seul élément fruité, 1,1 % d'un arôme naturel de fruits des bois pas même issu de l'agriculture biologique,
- des tortellinis jambon cru-parmesan Lustucru (Panzani, Ebro Foods) dont la farce (48 % du total) contient 24 % de jambon cru et 2,8 % de parmesan AOP.
Quand bien même leur emballage tendrait à abuser le consommateur, tous ces produits répondent à la réglementation française et communautaire, reconnaît Ingrid Kragl, qui pointe l'existence de « vides juridiques » et dénonce les codes professionnels qui « protègent les industriels, pas les consommateurs ».
Foodwatch, créée en Allemagne en 2002 par un ancien directeur de Greenpeace International, Thilo Bode, revendique 28.000 adhérents payants dans le pays. L'ONG s'est aussi installée aux Pays-Bas en 2010.
Un « coup de com' » (Michel-Edouard Leclerc)
Michel-Edouard Leclerc, le patron des hyper- et supermarchés éponymes, qui se retrouve la cible de la première pétition de l'ONG dans l'Hexagone (« Non à la dinde à l'eau ! »), a dénoncé sur son blog un « coup de com' » de l'organisation.
« Non, il n'y a pas de malveillance, il n'y a pas tromperie, il n'y a pas de mensonge », a-t-il réagi. « On peut discuter de la pertinence d'une offre, on peut choisir un produit avec des taux de saumure différents mais si le législateur a encadré et prévu qu'on mentionne ces taux (ce que la marque ciblée a fait), c'est bien pour qu'il y en ait pour tous les goûts », a-t-il souligné. Et de conclure, non sans ironie : « Si on veut du jambon sans eau, ça s'appelle du jambon sec... et il s'en vend aussi chez E. Leclerc ! »