La productivité totale en agriculture, appréciée par le rapport entre la production et les facteurs de production (terre, eau, intrants utilisés) ne baisse pas, et même continue de croître de 2 % par an dans les grandes régions du monde sur les cinquante dernières années. La progression atteint même de 2,4 % par an en moyenne sur les dix dernières années dans les pays développés, selon une étude de l'OCDE, présentée lors d'un colloque sur la productivité organisé par Pluriagri, ce 26 février 2013 mardi au Salon de l'agriculture.
En revanche, un ralentissement de la croissance des rendements en céréales, et particulièrement en blé, est observé. En Europe, sur la dernière décennie, les rendements en blé ont augmenté de moins de 1 % par an, certainement à cause du réchauffement climatique.
Alors que se serait-il passé en Europe si les rendements n'avaient pas augmenté depuis quarante ans ? La production végétale en équivalent kcal/ha/jour serait restée aux performances de 1970, à 17.260, au lieu des 28.100 calculés pour 2007, selon l'étude du Cirad de Bruno Dorin, menée pour Pluriagri. Avec trois conséquences possibles :
- Premier scénario : une augmentation des importations nettes de 139 %, fragilisant l'indépendance alimentaire et créant une pression sur les prix.
- Deuxième possibilité : les surfaces cultivées auraient crû de 60 %, avec un besoin de 78 millions d'hectares supplémentaires, empiétant sur les prairies et les forêts.
- Enfin, troisième scénario, une baisse forcée de la consommation de protéines animales de 40 %.
Ainsi, si la hausse des rendements apparaît positive en Europe, est-elle sans conséquences ? Pour Jean Claude Bévillard, vice-président de FNE (France Nature Environnement), la hausse de la production à grand renfort d'intrants n'est pas un progrès et serait plutôt taxable de « productivisme ». Pour lui, la consommation globale annuelle en intrants ne diminue pas.
Au contraire, estime Philippe Pinta, président d'Orama, des progrès sensibles ont été réalisés en économies d'intrants grâce aux outils d'aide à la décision. Il note sur les vingt dernières années, une division par deux des quantités d'engrais épandus par hectare et une division par dix des phytos par hectare, un signe de productivité.
Difficile donc de concilier productivité et productivisme. Question aussi de vision de la mission de l'agriculture : l'Europe a-t-elle pour mission de participer à nourrir le monde, comme le pense Philippe Pinta, ou « à faire un travail correct chez nous » comme le préconise M. Bévillard ? Peut-être les deux à la fois.
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mercredi 27 février 2013 - 09h50
Il n'y a pas que le climat qui fait baisser les rendements, il y a aussi les baisses d'intrants liées aux mesures environnementales. Si on nourrit moins les plantes, qu'on laisse plus prospérer la concurrence des adventices et qu'on les soigne moins, il est inéluctable qu'elles produisent moins. Ceci dit c'est très bien: tout ce qui réduit l'offre fait monter les prix. Quant à dire que l'on doublera la production d'ici 2050, c'est impossible, avec de telles méthodes; si cette augmentation a lieu, elle se fera ailleurs qu'en France ou qu'en Europe, dans des pays qui s'en fichent. On pourra toujours importer, même OGM.