vendredi 18 juin 2010 - 15h44
Né à Mouscardès, berceau de nombreux écarteurs célèbres de course landaise, Mathieu Noguès, vingt ans, s'annonce déjà comme la relève prometteuse.
« Sacré champion de France en 2009 des écarteurs de vaches sans corde, Mathieu a réuni en trois ans plus de coupes que je ne l'ai fait en vingt ans de carrière ! », témoigne fièrement Alain Noguès, le père de Mathieu.
Cet ancien torero, éleveur de blondes d'Aquitaine sous label « Bœuf de Chalosse », a délaissé les arènes à trente-six ans.
« On prend tous beaucoup de coups et cela devenait trop dur à concilier avec les travaux de l'exploitation », poursuit-il.
Mathieu porte sur ses épaules l'héritage familial : depuis cinq générations, on est agriculteur l'hiver et sauteur ou écarteur l'été.
« A l'époque, cette activité offrait un complément de revenus indispensable pour faire tourner la ferme », précise Alain.
Aujourd'hui, avec un Bepa en poche et un CAP en conduite de poids lourds en préparation, Mathieu espère bien faire perdurer cette grande tradition coursayre, celle des toreros paysans, en s'installant sur l'exploitation familiale de Mouscardès, dans les Landes.
Dans l'arène
Pour l'heure, il enchaîne les courses avec la ganaderia Dal – troupeau auquel est rattaché le torero – qu'il a intégrée dès sa sortie de l'école taurine.
De mars à octobre, il sillonne les arènes du Sud-Ouest, des confins du Gers à l'océan Atlantique.
« Une course, c'est deux heures de concentration intense, de vigilance pour soi mais aussi pour les autres, afin de réagir immédiatement si l'un d'entre nous est touché par une vache, explique Mathieu. La technique et le physique ne font qu'un tiers de la réussite. La course landaise, c'est dans la tête ! Quand je rentre dans l'arène, je ne pense plus au danger mais au face-à-face avec l'animal, au plaisir procuré au public, à ces moments de convivialité partagée. »
Pourtant, Mathieu connaît bien les risques : son parrain, illustre torero, est décédé tragiquement en course quand il avait onze ans.
Mais son afición – passion – l'a emporté et le garçon a tenu tête à ses parents qui refusaient de l'inscrire à l'école taurine, ouverte aux jeunes dès quinze ans.
« Je n'y suis rentré qu'à seize ans, j'ai mis un an à les convaincre », se souvient le persévérant écarteur.
Attiré très jeune par « les paillettes des tenues, la confrontation à l'animal, le regard vif et les cornes pointues de ces vaches toutes noires », Mathieu rêve d'écarter depuis toujours.
« A huit ans, je m'entraînais déjà des heures durant à tourner des écarts devant une coursière – vache landaise – confectionnée avec un pneu affublé de cornes suspendu à une poutre du hangar », ajoute-t-il.
Durant les deux années d'école taurine, les entraînements hebdomadaires de deux heures lui ont appris les bases techniques des écarts, l'esthétique du geste.
Cette période a également été l'occasion de pratiquer avec des vaches « plus dociles » et sous l'œil d'un public « plus indulgent » lors des Courses de l'avenir, réservées aux jeunes.
Après un premier titre décroché en compétition formelle en 2009, gageons que son paisible hameau, dit « quartier des quatre champions », en hommage à son père, son parrain et deux voisins, tous anciens champions de France des écarteurs, sera un jour rebaptisé « quartier des cinq champions »...
Vocabulaire utilisé dans ce sport La course landaise est un sport géré par la Fédération française de course landaise (www.courselandaise.org). C'est l'une des quatre formes de tauromachie qui existent dans le monde. Elle est pratiquée avec des femelles, sans mise à mort, mais avec des figures (écarts et sauts). Tant le torero que la vache sont mis à l'honneur. Une quinzaine d'éleveurs possèdent un troupeau – ganaderia – auquel est rattaché une équipe – cuadrilla – composée d'écarteurs, de sauteurs et d'« hommes en blanc » (entraîneur, cordier, vacher). |
Tout un art Pour Mathieu, « ce sport nécessite des qualités athlétiques, mais c'est aussi un spectacle où le rôle du public est crucial : applaudissements, sifflets... C'est également un art : l'écarteur doit passer au plus près de la bête qui lui fonce dessus, sans tomber, et avec une finition de l'écart la plus élégante possible. » |
Marie-Laëtitia Melliand
(publié le 18 juin 2010)
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