Publié le vendredi 12 mars 2010 - 17h59
A la veille des élections régionales, le président de la République semble temporiser sur la taxe carbone, largement considérée, à droite, comme un impôt supplémentaire, en écartant l'idée de l'appliquer avant son instauration aux frontières de l'Europe.
Officiellement, l'objectif n'a pas varié. Comme l'a répété récemment le ministre de l'Ecologie, Jean-Louis Borloo, la nouvelle version de la « contribution climat énergie » (taxe carbone) retoquée par le Conseil constitutionnel à la fin de décembre 2010 entrera en vigueur au 1er juillet 2010.
Mais l'entretien accordé vendredi par le chef de l'Etat au Figaro Magazine, ajouté aux déclarations de ténors de l'UMP, laisse au moins présager un changement de calendrier sur cette mesure emblématique dont il avait lui-même comparé l'importance à l'abolition de la peine de mort.
« Je dis très clairement que la France montrera l'exemple, que nous voulons tenir nos engagements de limitation des émissions de gaz à effet de serre, mais que nous voulons dans le même temps une taxe carbone aux frontières de l'Europe », a déclaré Nicolas Sarkozy.
« Nous n'imposerons pas à nos industriels des contraintes si, dans le même temps, on autorise les importations venant de pays qui ne respectent aucune des règles environnementales à inonder nos marchés », a-t-il précisé. Et de promettre qu'il prendrait « le temps de la concertation, au niveau européen comme au niveau national ».
La déclaration du président, qui n'avait jamais lié l'entrée en vigueur de la taxe carbone en France à l'adoption d'un dispositif équivalent dans l'Union européenne (UE), intervient alors que la fronde suscitée par cette mesure dans sa propre majorité semble reprendre de la vigueur.
Avant l'adoption de la première mouture, de nombreux élus de l'UMP avaient déjà dénoncé ce « nouvel impôt ». Alors que Jean-Louis Borloo concède sa « grande difficulté » à préparer un système « qui ne pénalise pas les entreprises ».
« Il est peut-être intéressant de se poser la question : “Est-ce une priorité ?”, quand on sait que c'est une taxe qui va fonctionner pour deux ans et demi, jusqu'à 2013, et dont la dimension européenne s'éloigne à cet instant », a estimé mercredi le chef de file des sénateurs de l'UMP, Gérard Longuet.
Son collègue Jean-Pierre Raffarin lui a emboîté le pas, vendredi, en jugeant que cette taxe « pose un problème [...] parce qu'au fond elle n'est pas applicable à court terme en Europe ».
Au nom de la « sagesse », l'ex-Premier ministre a, à son tour, proposé qu'une « action européenne » soit « un préalable à l'action française en matière de taxe carbone ». Avant d'ajouter qu'en matière de protection de l'environnement, « trop de Grenelle tuerait le Grenelle ».
Une semaine après la sortie du président suggérant un bémol aux exigences environnementales imposées aux agriculteurs, il n'en fallait pas plus pour que la gauche crie au « reniement », comme l'a relevé la première secrétaire du PS, Martine Aubry.
« Après la manière dont il a amené les choses depuis le début, en utilisant le terme et en le vidant de sa substance et de son utilité, ces déclarations étaient plus que probables », a déploré la secrétaire nationale des Verts, Cécile Duflot, tête de liste d'Europe Ecologie aux régionales en Ile-de-France.
« Ceux qui ont cru au Grenelle de l'environnement sont aujourd'hui forcés de constater qu'il ne s'agissait que d'une arnaque, une opération de com », a brocardé le député de la Gironde, Noël Mamère (Verts) ; « à la première difficulté, Nicolas Sarkozy capitule ».
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