« Mobilisons-nous pour la recherche et l'innovation agricole », a scandé mercredi matin Dacian Ciolos, commissaire européen à l' Agriculture, lors d'une conférence sur la recherche et l'innovation agricole à Bruxelles.
Pour le commissaire, l'agriculture du XXIe siècle « devra être durable et innovante pour être compétitive et socialement intégrée ». De ce fait il a adressé aux participants de cette conférence « un signal très clair sur (sa) détermination à soutenir la recherche, l'innovation et les échanges de connaissances en agriculture ».
La Commission européenne « a mis sur la table des propositions très ambitieuses dans ce domaine, assure Dacian Ciolos. Nous proposons de doubler les crédits disponibles au niveau européen sur ce thème et de mettre en place une boîte à outils complète à même d'amplifier l'effort de recherche et d'innovation agronomique (...) Nous devons travailler ensemble pour améliorer cette boite à outils ».
Selon le commissaire, « c'est un signal très fort » qui montre la volonté européenne de « remettre la recherche et l’innovation agricole au centre des préoccupations, de réinvestir tant du point de vue financier qu'intellectuel et d’aller jusqu’au bout du processus, dans les champs ».
De la science agronomique appliquée « plus plus » en quelque sorte. De quoi faire face selon lui aux « incertitudes multiples qui pèsent sur la production comme sur la durabilité du métier d’agriculteur », qu'elles soient économiques (« avec une volatilité sans précédent des marchés »), climatiques et environnementales (« avec des aléas plus fréquents et plus violents ») ou sanitaires (« avec le changement climatique et son lot de maladies nouvelles »).
C'est en construisant sur notre diversité et sur nos savoir-faire que nous trouverons des solutions innovantes et pertinentes sur le terrain, martèle D. Ciolos, car « c'est souvent en faisant travailler ensemble les différences que l'on trouve les solutions », a-t-il soutenu.
L'agriculture « doit être à l'écoute des citoyens et comprise par les citoyens. Cette oreille attentive doit venir non seulement des pouvoirs publics, mais aussi des agriculteurs ET des chercheurs », défend le commissaire. Pour que la relation entre l'homme et la nature continue de se faire « par des liens de confiance et non pas de défiance, la science doit prendre en compte l'ensemble des dimensions de l'agriculture et non pas uniquement sa dimension productive », martèle D. Ciolos.
Par conséquent, « les débats agronomiques et alimentaires ne peuvent pas être tranchés à huis-clos car ils engagent l'ensemble de la société », tranche-t-il. On retrouve là la tentative d'évaluation citoyenne de la recherche en agronomie telle qu'on a pu l'entrevoir en France dans au moins deux situations : la consultation citoyenne sur les essais de vignes transgéniques résistantes au court-noué à l'Inra de Colmar, et la commission économique, éthique et social (CEES) du Haut comité aux biotechnologies (HCB) qui rend des recommandations sur les sujets OGM en parallèle des avis donnés par le comité scientifique (CS). Pour l'une comme pour l'autre, on peut avancer aujourd'hui que ces tentatives ont été des échecs cuisants.
« Les thématiques de recherches doivent être élargies »
« Tous les champs de la recherche doivent être explorés – de façon inclusive et par des acteurs travaillant de manière intégrée et participative - pour remplir nos objectifs politiques », de la sécurité alimentaire en passant par la gestion des ressources naturelles, jusqu'aux aspects liés à l'économie agricole, indique le commissaire. Il cite la question de la répartition de la valeur ajoutée au sein de la chaîne alimentaire, celle de l'organisation des filières et d'un développement équilibré des zones rurales.
Pour D. Ciolos, « nous devons passer d’une culture du transfert de connaissances à une culture d’intégration et de participation de l’ensemble des acteurs au processus de recherche pour croiser les approches et les réflexions ». Il appelle à une « véritable concertation de toute la chaîne de la connaissance agronomique, jusque dans les exploitations » afin de « travailler plus efficacement » à « rendre accessible » le stock de connaissances disponibles. Pourquoi ne pas jouer la carte du numérique en imaginant des « wikis » agronomiques accessibles facilement dans chaque exploitation à la façon de wikipedia ? Intéroge-t-il.
Par ailleurs « nous devons montrer notre capacité à envisager les enjeux du long terme sans oublier les préoccupations des acteurs à plus court terme », ajoute D. Ciolos.
Pour réaliser ces deux objectifs, « un décloisonnement des univers de la science et de la pratique est fondamental », précise le commissaire.
Ces objectifs peuvent s'appuyer sur le programme « Recherche et Innovation Horizon 2020 », sur le FAS (Système de conseil agricole) élargi, sur les programmes de développement rural « offrant des mesures de coopération et d'innovation renforcées » et sur le nouveau Partenariat européen pour l'innovation (PEI), a indiqué le commissaire.
Il insiste cependant pour que la recherche fondamentale soit soutenue parallèlement à la recherche appliquée et à l'innovation. Il faut « garantir, enfin, que les bonnes idées ne restent pas cantonnées à des publications érudites, mais qu'elles (...) soient portées à la connaissance de tous les agriculteurs ».
Il est également fondamental de renforcer le travail participatif et les synergies entre l'ensemble des acteurs, conclue Dacian Ciolos.
