Le groupe laitier français Lactalis a pris tout le monde de court en annonçant mardi une offre d'achat de 3,375 milliards d'euros sur l'italien Parmalat, une OPA que Rome ne juge « pas hostile » après avoir tout tenté pour bloquer cette offensive.
Cette annonce inattendue est intervenue le jour du sommet à Rome entre le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi et le président français Nicolas Sarkozy.
Lactalis, qui détient déjà près de 29 % de Parmalat depuis mars, « a décidé de lancer une offre publique d'achat sur la totalité des actions Parmalat à un prix de 2,60 euros par action » pour un montant total de 3,375 milliards d'euros, a-t-il indiqué, sans préciser le calendrier de l'opération.
Alors que Rome avait adopté ces dernières semaines plusieurs mesures afin de défendre Parmalat, Silvio Berlusconi a indiqué, à l'issue du sommet avec M. Sarkozy, qu'il ne considérait pas l'offre du français comme « hostile ».
L'annonce d'une OPA de Lactalis a en effet radicalement changé la donne pour Rome.
La Caisse des dépôts italienne, contrôlée par l'Etat, et des partenaires financiers italiens (banques et fonds) envisageaient, selon des sources proches du dossier, de lancer une offre sur 60 % de Parmalat pour environ 3 milliards mais surenchérir sur Lactalis leur coûterait désormais autour de 5 milliards.
M. Berlusconi espère donc que l'alliance italienne fera des propositions à Lactalis, afin que les Italiens prennent une participation dans Parmalat et éviter ainsi que l'OPA « n'arrive à son terme ».
« Lactalis est le premier acheteur de lait de Parmalat. Nous sommes condamnés à trouver une solution », a souligné de son côté M. Sarkozy.
Le Cavaliere a évoqué globalement le « souhait commun » de l'Italie et de la France « d'arriver à créer de grands groupes » transnationaux. « Cela sera à l'avantage de l'Italie et cela sera à l'avantage de la France (..) Il n'y a pas lieu de se faire une guerre », a renchéri M. Sarkozy.
Avec Parmalat, Lactalis deviendrait le « premier groupe mondial » du secteur laitier avec un chiffre d'affaires d'environ 14 milliards d'euros, a indiqué le groupe français, selon qui ce rachat permettra aux deux entreprises, qui ont une « forte complémentarité », de se renforcer plus facilement dans les pays émergents.
Lactalis a expliqué sa décision de lancer une OPA sur Parmalat par le « changement du cadre réglementaire » intervenu à la suite de sa montée au capital en mars.
Rome, qui ne digérait pas la récente multiplication des manoeuvres des groupes français en Italie (rachat du joaillier Bulgari par LVMH, intention d'EDF de prendre le contrôle d'Edison...), avait en effet permis à Parmalat de repousser son assemblée générale à fin juin afin de donner du temps à la formation d'une alliance italienne pour bloquer Lactalis.
Le gouvernement avait également annoncé la création d'un fonds d'investissement basé sur la Caisse des dépôts, sur le modèle du FSI français, afin de prendre des parts dans les groupes stratégiques pour les défendre des appétits étrangers.
Afin de rassurer, Lactalis a assuré qu'il avait un « projet ambitieux » pour Parmalat et qu'il voulait maintenir le siège en Italie et « sauvegarder les emplois et la filière italienne du lait, dans l'intérêt de l'économie locale ».
Le français envisage en outre de regrouper au sein de Parmalat ses activités européennes dans le lait et entend faire en sorte que Parmalat reste coté à la Bourse de Milan en revendant « si nécessaire » une part à l'issue de son offre.
