L'accord du 3 juin 2009 sur le prix du lait s'appliquera au deuxième trimestre. C'est Bruno Le Maire en personne qui l'a annoncé le 30 mars 2010, après une réunion avec la FNPL (producteurs de lait de la FNSEA), la FNCL (coopératives laitières) et la Fnil (industriels privés) sous l'égide du ministère de l'Agriculture.
Le prix augmentera de 5,7 à 11,6 % par rapport au deuxième trimestre de 2009, après réécriture des grilles. « Il devrait tourner autour de 270-280 €/1.000 l en moyenne sur le deuxième trimestre, estime Henri Brichart, président de la FNPL. Je suis satisfait d'avoir abouti à ce compromis, car il permettra aux producteurs de sortir la tête de l'eau.»
Il aura fallu l'implication des pouvoirs publics pour que les producteurs obtiennent gain de cause, après les échecs successifs des réunions des interprofessions régionales (Criel) depuis le 24 mars 2010.
Nouveaux indicateurs
En contrepartie, les industriels, tant privés que coopératifs, voient leur demande prise en compte : de nouveaux indicateurs seront intégrés dans le calcul du prix du lait.
« L'interprofession devra définir avant le 31 mai 2010 trois nouveaux indices, qui seront applicables dès le 1er juillet 2010 : un indicateur sur l'écart de prix entre la France et l'Allemagne, un indicateur de valorisation du beurre et de la poudre mais aussi des produits de grande consommation; enfin, un indice sur les coûts de production du lait », a averti Bruno Le Maire.
Pour Henri Brichart, « ce compromis a le mérite de donner une continuité à l'accord du 3 juin. Le chantier sur les indicateurs était contenu dans l'accord, mais il traînait un peu... », a-t-il reconnu. Il reste à peine deux mois pour élaborer les indices en question. Seront-ils favorables – ou au contraire défavorables – aux éleveurs ? C'est le rapport de force entre producteurs et industriels qui fera pencher la balance d'un côté ou de l'autre.
Pour la FNSEA et la FNPL, l'armistice intervient à temps. Il devrait leur garantir des assemblées générales plus calmes les 31 mars et 14 avril 2010. Jean-Michel Lemétayer a d'ailleurs décidé d'enterrer la hache de guerre en appelant à la démobilisation de ses troupes. « Maintenant que l'accord est respecté, il n'y a plus de raison de manifester », a-t-il déclaré mardi sur BFM. Ces derniers jours, des éleveurs ont manifesté dans différentes régions en retirant des produits laitiers des rayons des grandes surfaces. Lactalis était particulièrement visé.
Réactions des syndicats minoritaires
Mais ni l'Organisation des producteurs de lait (OPL, branche de la Coordination rurale) ni la Confédération paysanne ne sont convaincues du bien-fondé du compromis conclu ce 30 mars entre la FNPL et les industriels.
Pour l'OPL, « il ne fait que limiter les dégâts. […] Cette hausse ne permet toujours pas aux producteurs d'obtenir un revenu décent : ils continuent à produire à perte, loin des 400 €/t qu'ils attendent ». Le syndicat restera « très vigilant sur la détermination des critères dits “de compétitivité” obtenus par les industriels ». Si la prise en compte du coût de production est positive, les références aux cours mondiaux du beurre et de la poudre, ainsi qu'aux prix allemands, risquent de tirer encore davantage les prix vers le bas.
Un avis partagé par la Confédération paysanne, pour qui « l'accord du 3 juin reste un mauvais accord. Même avec une augmentation de 9 à 10 %, le prix restera trop bas pour rémunérer le travail des paysans. […] Compte tenu du contexte, le prix moyen pour 2010 ne pourra être supérieur à celui de 2009 ».
Bon ou mauvais, ce compromis prive les syndicats minoritaires et l'Association des producteurs de lait (Apli) d'un argument fort pour mobiliser leurs troupes.