Alors que le projet de loi de modernisation (LMA) fait la navette entre le Sénat et l’Assemblée nationale, la Confédération paysanne (CP) fait le point des avancées apportées par les sénateurs au texte du gouvernement, que le syndicat estime « rédigé à la va-vite ».
« Il était important d'inscrire la politique alimentaire dans une loi », a indiqué Philippe Collin, le porte-parole du syndicat, lors d’une conférence de presse à Paris le 8 juin 2010. Et puis « les sénateurs ont instauré un lien plus clair, même s’il est ténu, entre la politique alimentaire et la politique agricole ». Mais le syndicaliste a le sentiment que l’affirmation d’une politique alimentaire vise davantage à préparer une politique européenne plus volontaire dans ce domaine, comme aux Etats-Unis, avec les bons alimentaires.
Le reste du projet, malgré les amendements apportés par les sénateurs, continue d’inquiéter la Confédération paysanne. « Dans le titre 2 relatif à la compétitivité des entreprises, rien ne permet de dire que le revenu des paysans sera conforté », souligne Philippe Collin. Et puis, « une somme de contrats n'a jamais fait une politique. Il faut réguler les marchés. Sans cela, tous les efforts seront vains ».
Le syndicat redoute que le dispositif, qui ne garantit pas l’accès au marché, renforce aussi la pression sur les agriculteurs qui n’auront pas contractualisé, et qui deviendront la variable d’ajustement des prix. « L’engagement de livraison des agriculteurs n’est pas contrebalancé par un engagement d’acheter », déclare Philippe Collin. Le syndicat craint que certains en profitent pour « trier » leurs fournisseurs. Il aurait souhaité que la contractualisation soit davantage liée à l’Observatoire des prix et des marges, si celui-ci avait pu fixer des prix indicatifs pour la rémunération des denrées alimentaires.
La Confédération paysanne regrette aussi que rien n’interdise la revente à perte. « L’interdiction de retourner la marchandise au producteur ne sera pas appliquée sur le terrain, affirme le syndicat. L’acheteur pourra menacer de ne pas prendre la récolte suivante. La loi ne va pas sur les fondamentaux, il faut une véritable action sur les prix. »
Philippe Collin regrette toujours « la privatisation de la protection des paysans », autrement dit le remplacement des fonds de solidarité par l’assurance. Le dispositif assuranciel ne sert qu’à « mieux couvrir ceux qui en ont déjà les moyens », dénonce le porte-parole.
Autre lacune dénoncée par le syndicat : le projet fait l’impasse sur l’accès au statut du paysan. La CP espère que les députés amélioreront le statut de cotisant solidaire, lui donnant enfin des droits à la retraite et un accès aux soins.
La CP a présenté la semaine dernière aux députés une série d’amendements, mais les députés n’ont, semble-t-il, pas fait preuve d’une grande ouverture… Le texte est actuellement en discussion au sein de la commission économique de l’Assemblée nationale. Il sera débattu en séance plénière du 30 juin au 3 juillet 2010, avant d’être définitivement adopté à la mi-juillet.