Le ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire, a lancé mardi au Sénat l'examen de son projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP) en assurant que son « premier objectif est de garantir aux agriculteurs un revenu » digne.
« Le premier objectif, c'est de garantir aux agriculteurs un revenu qui leur permette de vivre dignement de leur travail », a-t-il déclaré. « Il n'est pas acceptable que des milliers de producteurs en France vendent les produits en dessous de leur coût de production », a-t-il lancé.
Pour atteindre cet objectif, « nous devons changer de modèle économique » et « donner de la visibilité sur leurs revenus » aux agriculteurs. Il a détaillé une des mesures phares de son texte : l'instauration de « contrats écrits obligatoires avec un prix, un volume et une durée » entre producteurs et industriels pour notamment lutter contre la volatilité des prix.
Répondant à certaines inquiétudes des producteurs, il a assuré avoir entouré ces contrats « de toutes les garanties nécessaires ». Il a ainsi souligné que « ce sont les interprofessions qui négocieront en première instance les contrats pour respecter les particularités de chaque filière » et que les pouvoirs publics « garderont une capacité d'examen » sur ces contrats.
« Les interprofessions pourront fixer des indicateurs de tendance de marché » a-t-il aussi pointé.
Il a également insisté sur la « rénovation des circuits de commercialisation des produits agricoles » engagée par son texte. Il a annoncé que l'accord signé lundi à l'Elysée sur la modération de marges sur les prix des fruits et légumes Etat-distributeurs « sera applicable dès cet été ».
« Nous supprimerons totalement les pratiques de remises, rabais et ristournes » et « plus aucun fruit ou légume qui n'a pas été commandé ne pourra se retrouver sur un marché », a-t-il assuré.
« Plus aucun fruit ou légume ne pourra quitter une exploitation sans que les modalités de fixation de son prix n'aient fait l'objet d'un contrat écrit », a-t-il ajouté.
Les réactions des sénateurs
« Aucun autre secteur de l'économie n'est aussi durement touché », a constaté le rapporteur Gérard César (UMP). Il a pointé « l'instabilité des prix », des « agriculteurs petits et faibles face à l'aval des filières », « la pleine exposition à la concurrence internationale ».
L'ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin (UMP) a plaidé pour « un allègement des charges » et « la diversité des productions ». Il a émis des réserves sur l'accord avec les distributeurs observant que « la distribution a un talent extraordinaire pour utiliser les règlements à son avantage » et appelant à « taxer ses produits financiers ».
Plus de 650 amendements ont été déposés illustrant l'importance de ce texte, inscrit en urgence (une lecture par assemblée) pour ces élus des territoires.
« L'agriculture est le poumon de plusieurs milliers de communes dont la vie économique est totalement dépendante de son activité », a lancé le président du PRG, Jean-Michel Baylet.
La gauche, PS et PCF, a déposé deux motions de procédure pour manifester son opposition à un projet qui « ne répond pas à la gravité de la crise ».
« Les racines du mal résident dans les impasses du modèle libéral », a souligné Odette Herviaux (PS), qui a fustigé la loi de modernisation de l'économie (LME) « qui permet à la distribution d'imposer aux exploitants agricoles des prix de moins en moins rémunérateurs » et « un budget agricole sous-dimensionné ».
« Aucune disposition n'interdit la spéculation sur les denrées agricoles, rien ne limite les importations abusives extranationales ou extracommunautaires pour casser les prix à la production », a déploré Gérard Le Cam (CRC-SPG, communistes et Parti de gauche).
Le débat est programmé jusqu'au 26 mai mais pourrait être prolongé si c'est nécessaire.