(Article mis à jour le 25 janvier 2012)
La Cour des comptes, qui a mené une évaluation de la politique d'aide aux biocarburants en France, estime que les consommateurs ont déboursé 3 milliards d'euros de plus pour les biocarburants, en raison d'une consommation plus importante et de mesures fiscales.
L'étude de la Cour des comptes, publiée mardi, porte sur la période de 2005 à 2010. Les biocarburants en France sont aujourd'hui vendus après mélange avec les hydrocarbures. Ils sont distribués pour la circulation automobile sous deux formes, le biodiesel en addition au gazole et le bioéthanol en addition à l'essence.
Toutefois, la moindre densité énergétique des biocarburants implique un surcroît de consommation pour les automobilistes, qui doivent mettre un peu plus de carburant pour parcourir la même distance, constate la Cour dans son rapport. Pour le consommateur s'ajoute également le prix plus élevé des biocarburants répercuté à la pompe.
La Cour estime donc que sans transparence aucune, un transfert de coût s'est fait vers le consommateur et recommande de « satisfaire aux exigences de transparence » d'autant qu'elle estime que cette politique présente pour l'agriculture un « bilan mitigé quoique légèrement positif ».
En 2005, le plan concernant le biocarburant du gouvernement avait fixé comme objectif l'incorporation de 7 % de biocarburants à partir de 2010 et en cas de non-respect de ce seuil les distributeurs doivent s'acquitter d'une taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), « très pénalisante » d'après la Cour, qui précise que les industriels répercutent cette taxe sur le consommateur.
Dans le même temps, les industriels de la filière bénéficient d'une exonération partielle de la taxe intérieure de consommation (TIC, ex-TIPP), chiffrée à 2,65 milliards d'euros. La Cour estime qu'il faudrait « accélérer la réduction » de cette défiscalisation.
Sur le plan énergétique, le bilan n'est pas « aussi favorable qu'on pourrait le croire » indique la Cour. « Pour avoir un impact significatif en termes d'indépendance énergétique, il faudrait des taux d'incorporation plus élevés qui, poseraient de nombreux problèmes », ajoute cette dernière.
Quant à la pertinence du point de vue de l'environnement, elle est très difficile à mesurer et de plus en plus contestée.
La Coordination rurale et son Organisation des producteurs de grains (OPG) soulignent, dans un communiqué du 25 janvier 2012, que « cela fait de nombreuses années qu'[elles] attirent l'attention sur les investissements hasardeux faits par l'agro-industrie dans ce secteur et sur la défiscalisation colossale. [Elles] partagent donc les critiques de la Cour des comptes ». « Par contre, il faut cesser d'affirmer que cette filière a profité aux agriculteurs. [...] Les biocarburants n'ont fait, en Europe, que verrouiller une politique de prix très bas pour les grains. »
De son côté, la Collective du bioéthanol, dans un communiqué paru le 24 janvier, préfère faire ressortir du rapport de la Cour des comptes que l'incorporation croissante de bioéthanol dans les essences de 2005 à 2010 a généré 0,47 milliard d'euros de recettes fiscales supplémentaires au profit de l'Etat.
Le groupe Sofiprotéol, spécialiste des biodiesels, fait valoir que le surcoût pour le consommateur « est inférieur aux variations de prix observées d'une pompe à une autre, qui peuvent atteindre 10 centimes le litre ».
Selon Sofiprotéol, « grâce aux biocarburants, l'auto-approvisionnement en protéines de la France est passé de 30 % en 1980 à plus de 55 % aujourd'hui ». Le développement des biocarburants a en effet permis la production de coproduits, notamment les tourteaux de colza qui se substituent à ceux de soja importés, indispensables pour nourrir les animaux d'élevage.
Sofiprotéol souligne encore que, selon l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie), le biodiesel réduit les émissions de gaz à effet de serre de 59 % à 73 % selon les matières premières utilisées.
biocarburant
mercredi 25 janvier 2012 - 13h41
Si nos spécialistes en tout genre s'inquiètent du transfert de production vers le biocarburant, qu'ils aillent faire un tour chez les ''verdisseurs'' de Bruxelles. Ceux là ne sont pas inquiets sur l'avenir des volumes de production végétale.