Le SNIV-SNCP (industrie et commerce du porc) a mis en garde, jeudi dans un communiqué, « l'ensemble de la filière sur les dangers de démarches hâtives ou insuffisamment préparées qui conduiraient à la mise sur le marché de viande de porc malodorante ». Au même moment, le Comité régional porcin (CRP) Bretagne organisait une table-ronde sur l'élevage et la valorisation des mâles entiers lors de son assemblée générale à Ploufragan (Côtes-d'Armor).
Les débats bretons ont beaucoup tourné autour de la démarche engagée par la Cooperl Arcatlantique. Depuis un an et demi, 40 de ses adhérents ont arrêté de castrer les porcelets. La coopérative a ainsi abattu et testé les carcasses de 60.000 porcs. Patrice Drillet, son vice-président, n'a pas donné de détails sur la façon dont les carcasses pouvant poser des problèmes d'odeurs sont repérées. « Nous avons mûrement réfléchi, explique-t-il. Nous avons décidé que c'était jouable. »
Les distributeurs sont très réservés. « Quand le consommateur aura fait cuire des lardons avec une mauvaise odeur, il l'associera à un risque sanitaire, avertit Mathieu Pecqueur, le directeur en charge d'agriculture et qualité de la FCD (commerce et distribution). Il ne faut pas que ce type de produit arrive chez le consommateur. » Jean-Claude Nedelec, le représentant des transformateurs, tient le même discours. « Si les lardons sentent, le consommateur ne reviendra pas. Toute la filière perdra. »
Le représentant des abatteurs s'est interrogé sur l'urgence qu'il y a à se lancer dans la production de porcs entiers. « L'échéance est 2018, rappelle Patrice Le Mée, le directeur général des abattoirs Jean Floch. Pourquoi se précipiter ? Des études sont en cours. Si demain on généralise la production de porcs entiers, que fera-t-on de cette viande [malodorante , NDLR]. Cela représentera 5 % des 45.000 tonnes par semaine. »
Bref, la démarche de la Cooperl Arcatlantique bouscule tout ce petit monde, et est en marge des démarches collectives initiées sur le sujet. « Notre ambition est de nourrir les consommateurs, pas de nous planter, insiste Patrice Drillet. Nous avons demandé une équation. Cela fait deux ans qu'on presse les choses. On nous a dit, vous êtes les leaders, jouez votre rôle de locomotive. On ne pourra pas nous reprocher de ne pas avoir avancé. »
Fortuné Le Calvé, qui participait à sa dernière assemblée générale du CRP en tant que président, aurait préféré que le dossier soit géré collectivement. Se pose la question de mettre en place une grille pour ces mâles entiers, de décider des pénalités appliquées aux carcasses malodorantes, et de laisser le temps d'aboutir aux travaux de recherches engagés pour trouver une méthode fiable pour détecter ces carcasses sur les chaînes d'abattage.
« J'aurais préféré que les choses se passent autrement, fait-il remarquer à Patrice Drillet. J'espère que vous avez raison. Nous regarderons par-dessus le talus. Il n'est pas trop tard pour mettre en place une grille. Nous avancerons en travaillant le dossier ensemble, entre nous, lance-t-il à Patrice Le Mée. Fabriquons une grille ensemble et sortons de cette situation par le haut pour que les paysans connaissent l'équité. »