Le parlement français a interdit jeudi soir l'utilisation de la technique de la fracturation hydraulique pour l'exploration et l'exploitation des gaz et huile de schiste, sous la pression d'une forte mobilisation des populations concernées.
Après l'Assemblée nationale, le Sénat a, à son tour, voté définitivement une proposition de loi de l'UMP qui fera de la France le premier pays au monde à interdire l'usage de cette technique jugée hautement polluante.
Le vote a été acquis par 176 voix contre 151. Seule la majorité sénatoriale UMP et centriste a approuvé le texte. La gauche a voté contre, dénonçant un « recul ».
Nicolas Sarkozy avait assuré au début de juin au Premier ministre polonais Donald Tusk qu'il ne voulait « pas créer de difficultés » à la Pologne qui souhaite exploiter ses gigantesques réserves en gaz de schiste évaluées par les spécialistes à 5.300 milliards de mètres cubes.
C'est une fronde des élus locaux et écologistes ulcérés par l'octroi en catimini de permis d'exploration de ces hydrocarbures non conventionnels en mars 2010 dans le sud-est de la France ou dans le Bassin parisien qui a alerté les pouvoirs publics.
Ces autorisations « n'auraient pas dû être accordées avant les travaux que nous avons lancés », a déclaré la ministre de l'Environnement, Nathalie Kosciusko-Morizet, évoquant « une activité industrielle qui peut provoquer des risques et nuisances ».
La proposition de loi du chef de file des députés de l'UMP, Christian Jacob, « visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures par fracturation hydraulique », déposée en urgence (une lecture par assemblée), prévoyait à l'origine d'interdire leur recherche.
Elle a été amendée en première lecture à l'Assemblée, ne proposant plus que d'interdire la technique de la facturation hydraulique jugée hautement polluante, au grand dam des députés du PS qui avaient approuvé le texte d'origine.
Les titulaires des permis auront deux mois pour déclarer la technique utilisée et c'est seulement s'ils recourent à la fracturation hydraulique, ou s'ils ne répondent pas, que les permis seront abrogés.
La majorité et le gouvernement ne souhaitent pas fermer définitivement la porte à ces hydrocarbures, richesse potentielle du sous-sol français.
L'opposition, au contraire, souhaite l'interdiction pure et simple de leur exploration et exploitation au nom de la préservation environnementale. Elle demande l'annulation de tous les permis et une remise à plat du code minier.
« L'interdiction de cette seule technique laisse toute latitude à la mise en œuvre d'une autre méthode toute aussi dévastatrice », avait critiqué le sénateur écologiste Jean Desessard en première lecture.
Ce texte « ne clot pas le débat, l'embrouille et permet aux sociétés d'attendre des jours meilleurs », a déclaré jeudi Nicole Bricq (PS).
La ministre a levé jeudi les doutes sur la possibilité d'expérimentations scientifiques de la fracturation hydraulique votée en première lecture par le Sénat mais non retenue lors de la Commission mixte paritaire (sept sénateurs, sept députés) chargée d'établir un texte commun entre les deux assemblées.
« Il n'y aura pas d'expérimentations scientifiques sans une nouvelle loi », a assuré Mme Kosciusko-Morizet.
Les députés du PS ont renoncé à saisir le Conseil constitutionnel craignant que tout soit annulé et que les permis déjà accordés soient à nouveau utilisables.
Les collectifs anti-schiste ont lancé l'organisation d'un « rassemblement citoyen » du 26 au 28 août dans les Cévennes, à Lézan (Gard), sur l'avenir énergétique de la France.