« Etouffés par les grands groupes coopératifs ou privés, fournisseurs des produits nécessaires à l'agriculture et ceux qui collectent, transforment et vendent nos productions, nous, exploitants familiaux, réaffirmons que cette situation n'est viable ni pour les producteurs, ni pour les consommateurs », a déclaré Jean Mouzat, le président du Modef, la confédération syndicale agricole des exploitants familiaux, à l'occasion de son 17e congrès, à Bugeat, en Corrèze, le 3 novembre.
« Il nous faut mettre tout en œuvre pour empêcher le capital de s'approprier nos moyens de production et pervertir notre noble métier et nos missions sociétales », a-t-il ajouté. Un constat que partage sans réserve la nouvelle Fédération des jeunes exploitants familiaux (FJEF). « Nous ne pouvons que constater l'échec de cette agriculture qui prône l'agrandissement des fermes et la recherche perpétuelle de nouveaux capitaux pour une course à la modernisation qui, au lieu de rendre de la liberté et du confort aux paysans, les a rendu dépendants d'une mondialisation qui n'a que faire de leur bien-être », a déclaré Cyril Romero, son président.
Des propositions pour « résister à l'arrivée des détenteurs de capitaux extérieurs à l'agriculture »
Après un long plaidoyer contre la financiarisation de l'agriculture et son lot de grosses structures juridiques qui l'accompagnent, soutenue, selon lui, par la FNSEA et la Coordination rurale, Jean Mouzat a proposé aux quelques cent congressistes présents, de porter auprès des élus plusieurs propositions pour « résister à l'arrivée des détenteurs de capitaux extérieurs à l'agriculture », notamment dans ces sociétés de type SAS (société par action simplifiée) « qui constitue des entreprises capitalistiques où l'unicité capital-travail disparaît » :
- Sur le plan fiscal : réimposer l'obligation d'un commissaire aux comptes et s'opposer à ce que ces sociétés bénéficient des avantages fiscaux agricoles (DPI, DPA...) ;
- Sur le plan social : soumettre à cotisation sociale tous les revenus et dividendes versés aux actionnaires à partir du premier euro ;
- Sur le plan politique : renforcer le contrôle des structures pour limiter les agrandissements et favoriser l'installation.
- Sur le plan financier : ne pas reconnaître le gérant-salarié comme agriculteur, exclure ces SAS du bénéfice des prêts bonifiés et des aides Pac et plus largement, plafonner les aides Pac à 100.000 € par exploitation et redistribuer les économies budgétaires réalisées par une revalorisation de la surprime des 52 premiers hectares pour revenir un revenu décent aux exploitants familiaux. L'objectif du Modef est que cette surprime atteigne 30 % de l'enveloppe du premier pilier de la Pac, comme le permet la Commission européenne, dès 2016. Cette proposition est partagée par la Confédération paysanne, qui avait délégué au congrès un représentant national, Josian Palach. Soutien plus inattendu, le président FDSEA de la chambre d'agriculture de la Corrèze, présent au congrès a lui aussi défendu cette position.
Des prix planchers par type de production
Sur le revenu justement, « puisqu'il ne faut pas compter sur la volonté des acteurs économiques de partager la valeur ajoutée créée », le Modef en appelle à la volonté politique du législateur. Au niveau national, le syndicat réclame des prix planchers par type de production, couvrant les coûts de production (rémunération du travail paysan compris) et un encadrement des marges de la grande distribution avec la mise en place de coefficient multiplicateur. Au niveau européen, il appelle à sortir de la logique du libre-échange, avec notamment la mise en place d'outils de maîtrise des volumes de production bénéficiant de prix minimaux garantis ou l'abandon des accords commerciaux en discussion, notamment avec les Etats-Unis.
Le Modef appelle également à une politique foncière volontariste. Il demande par exemple que la loi encadre les prix des terres agricoles de sorte qu'ils soient en corrélation avec le revenu agricole qui peut être dégagé sur ces terres, que les Safer puissent rétrocéder les terres préemptées sous forme de location-vente à des jeunes qui souhaitent s'installer ou encore, que ces jeunes bénéficient d'une exonération totale de la taxe sur le foncier bâti et non bâti durant cinq ans au minimum et que leur soit attribué un Smic sur la même durée.
Pour favoriser l'installation, le Modef plaide aussi pour une retraite décente 1.200 € (au lieu de 800 € aujourd'hui), dès 60 ans et 37,5 ans de cotisations et la mise en place d'une indemnité viagère de transmission.
« Nous sommes sûrement beaucoup trop près du mur pour voir loin. Il est temps qu'une réelle prise de conscience s'impose à nos politiques ainsi qu'à chacun de nous, a souligné Cyril Romero. Il est l'heure de dire stop à cette agriculture productiviste. »
la folie des grandeurs (sans louis de funès!)
mercredi 04 novembre 2015 - 17h13
Si les grosses fermes sont si performantes il n'y a qu'a leur suprimer les aides PAC!!!