Des chercheurs ont mis au point une technique de prévisions météorologiques à partir des données transmises par les opérateurs de téléphonie mobile. Une technique moins couteuse que les radars satellite.
Lorsque la météo est mauvaise, le réseau de téléphonie mobile est souvent défectueux. Cela a d'ailleurs tendance à agacer les usagers. Mais des chercheurs ont réussi à démontrer que ces signaux faibles pouvaient être utilisés pour surveiller les précipitations, une technique qui pourrait se transformer en aide à la prise de décision pour les agriculteurs ou à prévenir les populations en cas de risques d'inondation. Marielle Gosset, Frédéric Cazenave et François Zougmoré ont été récompensés à l'occasion du salon World Efficiency, qui se tient cette semaine Porte de Versailles à Paris, pour leurs travaux sur le suivi des pluies grâce à la téléphonie mobile au Burkina Faso, conduit dans le cadre du consortium « Rain Cell Africa ».
Une méthode économique
Partant du fait que la pluie atténue le signal radio transmis entre deux antennes du réseau de télécommunication mobile, si l'opérateur enregistre ces perturbations, il est possible d'en déduire la pluie tombée entre tous les pylônes. Ainsi, le changement dans les signaux de téléphone provoqué par de fortes pluies peut être utilisé pour calculer la quantité de pluie qui est tombée dans la ville. Or, les entreprises de télécommunication entretiennent leur réseau et réalisent des maintenances. Ils sont donc en mesure de fournir les données nécessaires aux scientifiques. « Cette méthode bien plus économique que les radars satellites a été quantifiée sur le terrain au Burkina Faso », a insisté Marielle Gosset, du laboratoire Géosciences environnement à Toulouse.
Une entreprise de télécommunications de la ville de Ouagadougou a mis gratuitement à la disposition des chercheurs ses données de maintenance. Pour tester la précision du système de surveillance via les antennes relais, les chercheurs ont comparé le résultat obtenu avec 17 pluviomètres traditionnels et un radar météorologique, mis en place pour valider les résultats de l'étude. La comparaison a montré que la méthode des pylônes téléphoniques pourrait détecter avec précision 95 % des épisodes pluvieux importants qui se sont produits entre fin juin et début septembre ainsi que la quantité de précipitations.
Valable partout dans le monde
Les antennes relais pour la téléphonie mobile couvrent 90 % des zones habitées dans le monde, aussi bien urbaines que rurales. « En Afrique, le réseau de téléphonie est en pleine expansion, explique Frédéric Cazenave, du laboratoire d'étude des transferts en hydrologie. « On compte 180.000 pylônes sur l'ensemble de l'Afrique. Si seulement deux opérateurs acceptaient de nous fournir leurs données de maintenance, nous couvririons 75 % des territoires », poursuit-il. La balle est donc dans le camp des opérateurs, « d'autant que ces données n'ont aucun caractère sensible vis-à-vis des entreprises ou de leurs clients », précise François Zougmoré, du laboratoire de matériaux et environnement à l'université de Ouagadougou.
Une fois mise en place, cette technique permettra d'informer les populations en cas d'épisode climatique important (sécheresse ou pluie intense susceptible de provoquer des innondations). Elle pourra également jouer un rôle important pour l'agriculture. « Ce sera un outil précieux pour nos agriculteurs afin qu'ils optimisent les périodes de semis et de récoltes », avance François Zougmoré.