La tension est montée d'un cran lundi à l'OMC, les Etats-Unis, l'Inde et la Chine s'accusant mutuellement d'empêcher un accord, alors que les négociateurs entamaient une deuxième semaine de discussions sur la libéralisation des échanges mondiaux.
«Le problème principal est de garder son sang froid», a déclaré le ministre brésilien du Commerce Celso Amorim à l'ouverture d'une réunion du cénacle des sept grandes puissances commerciales (Etats-Unis, UE Brésil, Inde, Australie, Japon et Chine).
Malgré les mises en garde du directeur général de l'Organisation mondiale du commerce Pascal Lamy, qui a averti les 153 Etats membres que «l'horloge joue contre nous, il est temps pour tout le monde de faire preuve de souplesse», les sept grands n'ont pas réussi à aplanir leurs divergences pour mettre un terme à sept ans de négociations sur la libéralisation des échanges.
En France, un communiqué de l'Elysée indique que «le Conseil des ministres considère que le projet actuellement sur la table n’est pas acceptable en l’état dans la mesure où il ne comporte aucune avancée sur des éléments essentiels, en particulier la protection des indications géographiques de provenance (appellation d’origine) et la défense des intérêts industriels européens face aux grands pays émergents».
«Une action décisive devait donc être d’urgence entreprise par la Commission européenne sur ces éléments», indique de son côté Matignon, suite à la réunion lundi à 16 heures le Comité interministériel sur l’Europe.
A Rome, le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi, a déclaré «confirmer la préoccupation de l'Italie face à l'absence de progrès sur la question des mentions d'origine géographique des produits ainsi que sur l'accès aux marchés industriels des pays émergents».
«Nous sommes très préoccupés par l'orientation qu'ont pris deux pays», a accusé la représentante américaine au Commerce Susan Schwab. «Nous avions pris vendredi un véritable chemin vers une conclusion fructueuse du cycle de Doha», a rappelé Mme Schwab. «Nous sommes maintenant dans une situation où un des pays n'était pas partie à l'accord initial et un autre revient sur les engagements qu'il avait pris vis-à-vis des autres vendredi», a-t-elle ajouté.
Un paquet de propositions sur l'agriculture et les produits industriels mis sur la table vendredi par Pascal Lamy, a remporté l'aval de la majorité des grandes puissances commerciales. Mais l'Inde a boudé le texte, suivie par plusieurs pays en développement qui craignent pour leurs industries naissantes ou leurs petits agriculteurs.
New Delhi a été rejointe samedi par un acteur de poids: la Chine. Pékin a averti qu'il entendait protéger sa production de riz, de coton et de sucre, produits sur lesquels il refuse d'abaisser ses droits de douane.
«Nous ne bloquons pas (les négociations)», a relevé le ministre indien du Commerce Kamal Nath. Il s'en est lui-même pris aux Etats-Unis en affirmant que Washington «veut obtenir deux fois le montant des subventions accordées actuellement. Ils disent: ''nous voulons avoir le droit de doubler nos subventions et nous ne les triplerons pas. Que donnez-vous en échange ?''».
En fin de journée, Kamal Nath a ajouté être «toujours optimiste» sur l'aboutissement des négociations, tout en déplorant qu'il n'y ait eu aucun progrès sur certains secteurs comme le coton, les subventions nuisant aux échanges commerciaux et la clause de sauvegarde.
De son côté, Pékin s'est insurgé contre les attaques américaines, l'ambassadeur chinois auprès de l'OMC Sun Zhenyu accusant les Etats-Unis qui «ne se sont pas engagés eux-mêmes à réduire véritablement leurs subventions sur le coton».
Ces subventions «ont provoqué des torts importants pour les producteurs de coton dans les pays en développement, en Afrique et pour quelque 150 millions d'entre eux en Chine», a-t-il accusé.
«Nous estimons que les Etats-Unis ne sont pas en position de discuter avec les pays en développement des tarifs sur le coton tant qu'ils n'auront pas éliminé leurs subventions», a estimé l'ambassadeur chinois.