Les négociations entamées le 21 juillet au sein de l'OMC à Genève vont connaître un nouveau sursis mardi après s'être prolongées tard dans la nuit sans accord entre les principales puissances commerciales.
Peu avant la décision d'interrompre les discussions jusqu'à mardi, le porte-parole de l'OMC Keith Rockwell, avait qualifié les négociations de «très tendues». Pour le ministre brésilien des Affaires étrangères, Celso Amorim, elles sont «sur le fil du rasoir».
Les dissensions se sont creusées dans le camp européen. Neuf pays de l'Union européenne parmi les plus opposés aux propositions de Pascal Lamy se sont réunis lundi soir à Genève pour établir une position commune alors qu'il revient en principe à la Commission européenne de négocier au nom des 27 pays membres. Il s'agit de l'Italie, de la France, de l'Irlande, de la Pologne, de la Hongrie, de la Grèce, du Portugal, de la Lituanie et de Chypre. La France exerce actuellement la présidence semestrielle de l'Union européenne.
Le Premier ministre français François Fillon a notamment demandé lundi à la Commission européenne de mener une «action décisive» sur les négociations de libéralisation des échanges à l'OMC, rappelant que pour la France «le projet actuellement sur la table n'était pas acceptable en l'état».
«Nous avons eu des discussions intensives et elles continueront demain» mardi, a déclaré à la presse le ministre indien du commerce Kamal Nath à l'issue d'une réunion du groupe des sept principales puissances commerciales (Etats-Unis, Union européenne, Japon, Chine, Inde, Brésil, Australie).
L'Inde est apparue tout au long de la journée de lundi comme l'un des principaux obstacles à la recherche d'un accord, notamment sur la question de la clause de sauvegarde, une protection tarifaire souhaitée par des pays en développement en cas de flambée des importations d'un ou plusieurs produits agricoles.
Delhi veut notamment pouvoir la déclencher à partir d'un seuil relativement bas de hausse des importations ou de baisse des prix sur le marché intérieur pour protéger ses propres producteurs alors que d'autre pays, comme les Etats-Unis, craignent que cela ne la transforme en un outil protectionniste.
La journée de lundi a notamment été le théâtre d'affrontements verbaux assez vifs entre Américains d'un côté et Indiens et Chinois de l'autre, le camp européen montrant des signes manifestes de division.
Les Chinois ont réclamé une forte réduction, voire l'élimination, des subventions américaines sur le coton qui «ont provoqué des torts importants pour les producteurs de coton dans les pays en développement, en Afrique et pour quelque 150 millions d'entre eux en Chine», selon les termes employés par l'ambassadeur chinois auprès de l'OMC Sun Zhenyu.
M. Nath a affirmé pour sa part que les Etats-Unis «veulent obtenir deux fois le montant des subventions accordées actuellement. Ils disent : ''nous voulons avoir le droit de doubler nos subventions et nous ne les triplerons pas. Que donnez-vous en échange ?''».
La négociatrice américaine Susan Schwab a pour sa part déploré le fait que la Chine était revenue sur des engagements pris vendredi lorsque le directeur général de l'OMC Pascal Lamy avait mis sur la table une proposition de compromis qui avait recueilli l'approbation de nombreuses délégations.
Le ministre indien a rappelé lundi qu'il ne s'était pour sa part jamais rallié à cette proposition de compromis.
Des petits pays exportateurs comme l'Uruguay et le Paraguay, ont également attaqué l'Inde sur la question de la clause de sauvegarde. Ils ont accusé Delhi de vouloir protéger son marché alors que les marchés émergents sont le principal débouché pour leurs exportations agricoles.