La Banque mondiale, qui réunissait dimanche son comité pour le développement, a appelé les gouvernements des pays membres à intervenir d'urgence pour éviter que la crise alimentaire n'appauvrisse encore davantage quelque 100 millions de personnes dans le monde.
«Les prix de l'alimentation, s'ils continuent comme ils le font maintenant, (...) les conséquences seront terribles», avait pour sa part lancé la veille Dominique Strauss-Kahn, directeur général du FMI. «Comme nous l'avons appris dans le passé, ce genre de situation se finit parfois en guerre.»
En Haïti, le pays le plus pauvre du continent américain, le premier ministre a été destitué samedi après plus d'une semaine d'émeutes provoquées par la flambée des prix de l'essence et des produits alimentaires.
«Sur la base d'une analyse sommaire, nous estimons que le doublement des prix alimentaires au cours des trois dernières années pourrait pousser plus profondément dans la misère 100 millions d'individus vivant dans les pays pauvres», a expliqué Robert Zoellick.
Les représentants des pays donateurs ont discuté un plan massif de lutte contre la malnutrition annoncé en début de mois par le président de la Banque mondiale, qui l'a comparé par son ampleur au «New Deal» américain après la grande dépression des années 1930.
L'institution considère que 33 Etats dans le monde sont menacés de troubles politiques et de désordres sociaux à cause de la montée brutale des prix des produits agricoles et énergétiques.
Le dossier sera discuté lors du G8 Finances, en juin au Japon. «Mais, franchement, nous ne pouvons attendre jusque-là», a reconnu M. Zoellick. Il avait averti que la crise pourrait avoir pour conséquence «sept années perdues» dans l'éradication de la faim dans le monde.
M. Zoellick a indiqué que le Programme alimentaire mondial (PAM) avait déjà reçu plus de la moitié des 500 millions de dollars qu'il a demandés à la communauté internationale avant le 1er mai. Mais «ce n'est pas assez». «Il demeure urgent que les gouvernements interviennent», a-t-il souligné.
La Banque mondiale, pour sa part, prévoit de presque doubler ses prêts agricoles en Afrique en les portant à 800 millions de dollars.
Ces derniers mois, la flambée alimentaire a entraîné des manifestations violentes en Egypte, au Cameroun, en Côte-d'Ivoire, en Mauritanie, en Ethiopie, à Madagascar, aux Philippines, en Indonésie...
La flambée des prix du riz, du blé, du maïs, de l'huile de cuisson, du lait et d'autres produits alimentaires survient en pleine crise financière.
Selon la ministre française de l'Economie Christine Lagarde, c'est elle en grande partie qui encourage les investisseurs à investir sur les marchés de matières premières, entraînant la flambée des prix de l'alimentation.
«Traitons la crise financière et on fera disparaître une partie de la pression qui s'exerce» sur les prix alimentaires, a-t-elle estimé.