Inter Afocg (association nationale de formation collective à la gestion) a organisé les 26 et 27 octobre 2010 rencontre nationale à Bourg-en-Bresse. Objectif : aider ses adhérents à retrouver du sens à leur métier.
De toutes les interventions est ressortie une idée force : pour se réaliser dans son métier, il faut se garder une marge de manœuvre, une marge de liberté. Brigitte Chizelle, sociologue qui intervient régulièrement auprès de groupes d'agriculteurs, a parlé de « l'autonomie irréductible » (1).
Elle a tracé des pistes pour garder le sens de son métier. Il n'est pas inutile de se questionner en continu : le vécu devient expérience et enrichit le métier. Ensuite, quand les soucis deviennent obsédants, mieux vaut déplacer son attention sur autre chose, aller voir ailleurs pour sortir de la plainte.
En troisième lieu, la qualité des liens tissés avec l'entourage, les discussions sur le métier, sur les objectifs que l'on aimerait atteindre, participent au meilleur-être. Tout comme les actions menées pour que le travail des agriculteurs soit reconnu et justement rémunéré.
Enfin, il faut garder « une autonomie irréductible » : « Quand on se dit que l'on n'a plus le choix, je conseille de se demander aussitôt : et si j'avais 100 % de choix, qu'est-ce que je ferais ? Cela redonne des idées, de l'air. »
Les autres intervenants ont repris implicitement la même idée : analyser sa comptabilité a du sens si cela révèle la marge de négociation avec son banquier, sa coopérative. Se former redonne confiance si cela permet d'approfondir son projet et non celui de son conseiller.
L'expertise, elle, se trouve chez les agriculteurs qui analysent leurs expériences. Chacun profite de la richesse des échanges avec les autres pour avancer.
Les agriculteurs qui ont témoigné lors de ces journées ont réorienté leur vie professionnelle, soit pour rester en phase avec leur projet de vie, soit pour faire face à un « pépin » professionnel.
La plupart d'entre eux ont opté pour des circuits courts ou (et) l'agriculture en bio. Ils ont souligné le plaisir de travailler en contact avec les consommateurs. Mais ils ont aussi évoqué sans tabou la quantité de travail nécessaire pour ces systèmes très gourmands en main-d'œuvre et la déception face à des revenus peu en rapport avec le temps passé.
« Dans mon étude prévisionnelle, cela prend plus de temps que prévu pour atteindre mon rythme de croisière. Ma femme a dû aller travailler à l'extérieur. Mais j'espère après quatre ans d'activité pouvoir enfin construire mon bâtiment et dégager davantage de revenu », a expliqué un jeune maraîcher qui livre quarante-cinq paniers à une Amap (Association pour le maintien d'une agriculture paysanne).
Un éleveur laitier en agriculture conventionnelle s'est inquiété de la qualité de vie de ses confrères adeptes des circuits courts et de leurs difficultés à intégrer les Cuma qui pourtant allègeraient leurs charges de matériel.
Au final, les congressistes se sont retrouvés sur l'idée de récupérer le pouvoir de penser et le pouvoir d'agir.
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(1) Expression de Michel Crozier, sociologue.