Dans les Landes, au cœur du pays du canard gras, les éleveurs se sont levés samedi, déboussolés. Après une nuit d’angoisse, ils n’ont pu que constater le désastre.
Jean-Marc Burgué, éleveur de canards gras, témoigne: «De 4 heures à 13 heures, ça n’a pas arrêté. Nous étions juste sur le couloir de la tempête». A Gibret, un petit village isolé de la Chalosse, les vents violents ont emporté tous les abris sur leur passage: tuiles, fibres-ciment, arceaux de tunnels, bâches et laine de verre. Quatre tunnels sur sept sont hors d’usage. Les autres doivent être renforcés car la journée de mercredi est encore classée "vigilance orange".
Les tunnels avaient été installés il y a tout juste six ans. «Chacun avait coûté entre 5.000 et 6.000 €», calcule l’éleveur. Heureusement, la poussinière a résisté à l’abri du hangar et l’éleveur est assuré. «Comment? On verra!», philosophe Jean-Marc, qui attendait la visite de l’assureur.
Avant le levé du soleil, eau et électricité étaient déjà coupées. Sans lumière ni chauffage, les canards, stressés, se sont entassés. Certains sont morts étouffés. «Nous avons bien branché le groupe électrogène actionné par le tracteur, mais il a lâché. Acheté après la tempête de 1976 qui nous avait privé d’électricité pendant 17 jours, nous n’en avions plus l’utilité car les lignes ont été enterrées. Avec, nous aurions pu faire tourner toute l’exploitation. Mais sans moyen de communication, difficile de joindre le réparateur. Heureusement, un copain nous a prêté un groupe. Le matin et le soir, nous l’utilisons pour gaver. Dans la journée, il sert à la maison», raconte Jean-Marc. Sur les trois bandes de 1.500 canards, il a perdu au moins 300 animaux. «Et, j’en retrouve morts tous les jours», constate-t-il impuissant.
Avec le soleil, Jean-Marc retrouve pourtant le moral. «Passé le choc du premier jour, on s’habitue au spectacle. Et il y a plus grave, certains pleurent des proches», relativise-t-il. D’ailleurs, il n’a pas le temps de s’apitoyer. Un simple regard sur son exploitation le rappelle à l’ordre.
Mais difficile de savoir par où commencer. «Il faut réparer les clôtures qui entourent les 10 hectares de parcours car les renards rôdent autour de ce beau garde-manger!», raconte Jean-Marc, un sourire amer au coin des lèvres. Mais sans électricité, la protection sera bien maigre. Il faut aussi ramasser les fibres-ciment et la laine de verre éparpillées à plus de 100 mètres à la ronde.
«Il faut faire face, retrouver le moral et repartir. Nous avons commencé par réparer la toiture de la maison, dont un quart s’est envolé.» José, le voisin, travaille dans le bâtiment. Même s’il n’habite là que depuis deux ans, il a pris une semaine de congés sans solde pour donner un coup de main. Dans quelques jours, il faudra aussi penser aux canards qui doivent arriver. En principe, les bandes se succèdent tous les 15 ou 20 jours. «Nous ne savons pas où nous allons les mettre», déclare Jean-Marc.