La publication des chiffres du revenu de 2012 souligne la fragilité des filières d'élevage, constatent les syndicats agricoles.
FNSEA et JA mettent l'accent sur les fortes variations des prix et des revenus depuis 2006, dénonçant les effets négatifs du démantèlement des outils de régulation de la Pac. « Le secteur de l'élevage se trouve aujourd'hui très fragilisé par la hausse des charges », soulignent les deux syndicats. Dans un communiqué commun, ils demandent aux gouvernants européens de « réinstaurer des outils de régulation dans la prochaine Pac, comme au niveau mondial, conformément aux engagements du G20 ». Les syndicats entendent intensifier leur combat pour l'organisation des filières [...] et pour une plus juste répartition des marges.
Pour Orama, la branche spécialisée en grandes cultures de la FNSEA, « la progression des revenus est un atout pour mieux relever les défis de demain », a déclaré Philippe Pinta, son président. La forte progression des résultats par rapport à 2011 « traduit leur extrême volatilité sur de courtes périodes [...], la nécessité de la contractualisation [...] et de l'accompagnement des filières animales, notamment via le Fonds de modernisation céréaliers-éleveurs ».
La FNB (Fédération nationale bovine) estime que « la situation est intenable. Elle « demande solennellement aux pouvoirs publics des mesures politiques majeures, en particulier dans le cadre de la négociation de la Pac post-2013 ».
« L'enjeu est tout d'abord de renforcer les mesures de régulation des filières et de gestion des aléas économiques, et permettre l'indispensable hausse du prix à la production, poursuit la FNB. Il est crucial d'obtenir d'autre part dans les textes communautaires, un réel moyen d'orientation de la Pac en faveur de l'Elevage, avec la possibilité d'attribuer une aide différenciée à l'ensemble des surfaces fourragères, en complément au soutien couplé à l'animal ».
La Coordination rurale (CR) considère l'année 2012 « globalement satisfaisante » pour les grandes cultures, faisant état « des charges d'approvisionnement qui continuent de s'alourdir, de la hausse des engrais (+14 %) uniquement contrôlée par une réduction de leurs achats (-15 %), ainsi que du surcoût de la mise en place du gazole non routier ». Du côté de l'élevage, « l'ensemble des éleveurs est fortement impacté par la hausse des charges alimentaires, avec des prix toujours trop faibles à la production », relève le syndicat, qui craint des arrêts dans le lait « au vu des échos dramatiques qui remontent du terrain ». « La seule lisibilité que les agriculteurs ont pour 2013 leur indique la continuelle augmentation des cours de leurs approvisionnements et un risque de plus grande précarité, reprend la CR, qui demande toujours une « réforme profonde de la Pac ».
La Confédération paysanne dénonce des résultats prévisionnels « trompeurs » qui « masquent une inégalité croissante et insupportable des revenus ». « Les céréaliers voient leur revenu atteindre des sommets presque indécents lorsqu'on sait qu'ils sont abondés par les subventions européennes ». De l'autre côté, les producteurs de fruits et légumes, les horticulteurs, certains viticulteurs, les éleveurs de ruminants sont en situation difficile. « La politique agricole libérale orchestrée par l'Union européenne et le gouvernement français doit s'arrêter », réclame le syndicat.
Le Modef note que « l'écart entre éleveurs et céréaliers est tel que, sur le terrain, un nombre important d'éleveurs de bovins à viande et lait ont décidé, soit de reconvertir leur exploitation en céréales, soit de cesser leur activité, avec toutes les conséquences sociales économiques et environnementales qu'on imagine. Si on veut conserver des territoires vivants, des productions diversifiées, des paysages variés, l'état se doit d'intervenir avec une politique volontariste pour : recoupler les aides afin de maintenir la diversité des productions, répartir équitablement les revenus par une redistribution des aides vers ceux qui en ont le plus besoin, protéger le marché agricole européen [...], créer un prix minimal couvrant les coûts de production et le travail, réduire les charges sociales des exploitants qui ont un revenu inférieur au Smic, et mettre en place des taux progressifs avec déplafonnement des cotisations vieillesse ».
« Nous sommes confrontés à un contexte économique qui creuse les écarts de revenus entre agriculteurs et entre filières. Les décisions européennes et françaises à venir devront répondre à cet enjeu, en confortant la diversité de nos filières et en créant des synergies plus fortes entre elles. A titre d'exemple, un plan protéines s'inscrit pleinement dans une telle démarche », a déclaré Guy Vasseur, le président des chambres d'agriculture.
« Ces résultats me confortent dans l'idée que la répartition des crédits de la Pac doit être rééquilibrée en faveur des filières d'élevage. Ils soulignent la nécessité de mettre en place des dispositifs de lissage de la volatilité des cours des matières premières », a réagi le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll.