L'Union européenne a pris une initiative spectaculaire lundi en proposant d'abaisser de 60% ses droits de douane sur les produits agricoles, le jour de l'ouverture d'une réunion cruciale à l'OMC pour conclure le cycle de négociations de Doha.
La proposition européenne a ouvert le jeu, alors que 75 ministres représentant 35 pays ont fait le voyage de Genève pour tenter de mettre la touche finale à près de sept ans de discussions entamées en 2001 à Doha (Qatar).
Le représentant européen au Commerce Peter Mandelson a proposé d'abaisser de 60% la moyenne des droits de douane agricoles de l'UE, contre les 54% précédemment annoncés.
Selon son porte-parole Peter Power, cette offre est «une avancée tout à fait considérable, une amélioration substantielle, qui devrait donner une impulsion importante aux discussions à Genève cette semaine».
Le Brésil, important exportateur agricole, qui a entamé un bras de fer avec les pays développés pour obtenir un meilleur accès à leurs marchés et la diminution de leurs subventions agricoles, a accueilli cette proposition de manière mitigée.
«Il ne s'agit pas d'une concession, mais de la conséquence des négociations», a commenté Roberto Azevedo, l'un des principaux négociateurs du Brésil. «Ce chiffre est une conséquence de différents chiffres sur lesquels les négociateurs se sont déjà mis d'accord», a-t-il ajouté.
«S'ils proposent de couper, c'est qu'ils ont de la place pour le faire», a relevé un autre membre de la délégation brésilienne.
Pour Pascal Lamy, le directeur de l'OMC qui a initié la réunion de cette semaine, les 152 Etats membres sont «à portée d'un pas fondamental pour conclure le cycle de Doha cette année», a-t-il déclaré lors de la séance plénière du matin.
Mais les divergences entre pays riches, qui demandent un meilleur accès aux marchés des pays émergents pour y exporter leurs biens industriels et pays en développement qui souhaitent voir supprimer les protections agricoles des pays développés, continuent.
«La contribution la plus importante doit venir de la libéralisation du marché plutôt que du côté des subventions» agricoles, a déclaré la représentante américaine au Commerce, Susan Schwab.
«Nous savons que nous avons un rôle de leader à jouer dans ce cycle, et nous sommes prêts à apporter notre contribution sur les soutiens les plus nocifs aux échanges», a-t-elle souligné.
M. Mandelson a abondé dans ce sens. «Un nombre limité de pays en développement doivent accepter des baisses de droits de douane» pour les produits industriels, et ces baisses «doivent être réelles» et «permettre un nouvel accès à leurs marchés en pratique», a insisté le commissaire européen au Commerce.
De leur côté, les pays africains représentés par l'Egypte ont souligné l'importance des négociations pour faire face à la hausse aiguë des prix des biens alimentaires.
«Si les pays riches échouent dans leur responsabilité à appliquer l'équilibre et la sensibilité face à la vulnérabilité des pays en développement, ce n'est pas seulement le système mondial du commerce qui est en danger», a déclaré le ministre égyptien du commerce Rachid Mohamed Rachid. «Nous mettons alors en danger la sécurité et la stabilité mondiale», a-t-il ajouté.
Des rencontres en petits groupes, dites en "chambre verte", présidées par Pascal Lamy, devaient être organisées lundi après-midi.