Claude Fauquet, directeur du Laboratoire international des biotechnologies appliquées à l'agriculture tropicale (ILTAB) aux Etats-Unis (Donald Danforth Center – Saint Louis, Missouri), de passage à Paris pour présenter l'avancée de ses travaux de recherche sur les cultures traditionnelles des pays en voie de développement, annonce que les premiers maniocs transgéniques résistants aux maladies seront cultivés d'ici à 2015 en Afrique.
«On est à la croisée des chemins», dit le chercheur franco-américain. Le séquençage des gènes du manioc vient de se terminer et les résultats ne sont même pas publiés que C. Fauquet prédit, «d'ici quatre ou cinq ans, l'explosion des tests d'essais en champ».
La qualité de ces tests «poussera les décideurs de ces pays (Ouganda, Kenya, Tanzanie, Nigéria...) à prendre la décision de cultiver ces plantes» qui permettent de combattre très efficacement la plupart des maladies qui s'attaquent au manioc, avec des pertes considérables pouvant atteindre 100% de la récolte lors des fortes infestations, explique le chercheur.
Les plantes OGM obtenues non seulement préservent la récolte, mais respectent également l'aspect culturel, agraire et gustatif du manioc, se réjouit C. Fauquet. Le chercheur souligne que ce résultat n'aurait pas pu être obtenu par une sélection classique, à cause de la complexité du génome de cette racine et de la transmission des caractères.
Interrogé sur l'indépendance de son laboratoire qui reçoit des dons de fondations célèbres, parmi lesquelles on trouve les Fondations Rockefeller, Bill Gates ou Monsanto, et la finalité humanitaire des travaux qui y sont menés, le directeur de l'ILTAB souligne que son laboratoire, à but non lucratif, a l'obligation de ne pas les utiliser à des fins commerciales.
«On ne peut recevoir des subsides de fondations que si ce sont des donations, insiste Claude Fauquet. Et selon la loi américaine, il n'y a aucun droit de regard sur l'utilisation de ces recherches. Bien que (certains) fonds proviennent de Monsanto et qu'ils soient ensuite mis à la disposition de la Fondation Monsanto, la compagnie ne peut pas nous demander de comptes sur les recherches que l'on mène avec ces fonds. […] Lorsque nous déposons des brevets, ils sont réservés à une utilisation gratuite à des fins humanitaires, comme le font près de 140 unités de recherche américaines.»