« La production porcine est confrontée à une baisse tendancielle de sa rentabilité », constate l'Institut du porc (Ifip). L'envolée des prix des matières premières alimentaires n'explique pas tout, ont constaté les quarante-cinquièmes Journées de la recherche porcine (JRP), réunies mardi et mercredi à Paris.
Selon l'Ifip, « les envolées en 2008 et 2011 du prix des matières premières végétales et de l'aliment du porc ont accru son coût de revient qui a atteint 1,55 €/kg carcasse ces années-là, contre 1,24 € en 2005-2006. [...] Dans un contexte d'offre abondante, le prix du porc payé aux éleveurs n'a pas compensé ce surcoût ».
Face à une telle situation, jugée « potentiellement durable », Christine Roguet (Ifip) et son équipe ont recherché des réponses sur le terrain de la performance d'élevage, analysant 1.686 élevages suivis en gestion technico-économique (GTE), dont 66 % situés en Bretagne. Leur conclusion : « L'excellence technique est possible dans tous les modèles d'élevage. Ce n'est pas l'apanage des grandes structures très spécialisées, mais davantage une question d'hommes. »
Les auteurs de l'étude constatent qu'une « grande partie des éleveurs identifiés comme les meilleurs en 2010 l'étaient déjà il y a dix ans, et l'écart se creuse. [...] La productivité numérique moyenne des élevages français serait supérieure de 1,2 porc produit par truie présente et par an si les capacités de production des 20 % moins bons étaient aux mains des 20 % meilleurs. C'est à peu près l'écart qui sépare aujourd'hui la moyenne française du Danemark et des Pays-Bas, les leaders sur ce critère ».
Une moindre compétitivité de la filière
Une autre équipe de l'Ifip, animée par Vincent Legendre, a enquêté sur le coût de la main-d'œuvre, depuis l'abattage jusqu'à la distribution, et son impact sur la compétitivité relative de la filière porcine française vis-à-vis de ses concurrentes espagnole et allemande.
La faiblesse des salaires en Espagne et le recours à une main-d'œuvre étrangère nombreuse en Allemagne (payée aux conditions du pays d'origine) conduisent à d'importants écarts de prix de revient : il en coûte 0,05 € pour abattre et élaborer un kilo de porc en Allemagne, 0,07 € en Espagne et 0,085 € en France, « toutes choses égales par ailleurs ».
Dans l'attente d'une harmonisation du droit du travail dans l'UE, « il est nécessaire d'adapter les stratégies industrielles pour compenser les coûts de main-d'œuvre avec les pays voisins, Allemagne et Espagne notamment », soulignent les auteurs de l'étude, qui identifient plusieurs pistes : délocaliser la découpe (ce que le danois Danish Crown a fait en Allemagne), rechercher les économies d'échelle, promouvoir l'innovation technologique, en particulier l'automatisation au niveau de l'élaboration des produits finis.