Les banderoles affichaient des origines géographiques très diverses : Aveyron, Vendée, Cantal, Cher... A l'appel de la Fnec (Fédération nationale des éleveurs caprins), toute la France caprine était, mardi à Surgères (Charente-Maritime), pour protester contre la baisse du prix du lait annoncée par le Glac au 1er janvier 2011. 400 éleveurs ont défilé dans les rues de la ville avant d'aller négocier, à l'Association centrale des laiteries, l'annulation de cette baisse.
La contre-proposition – à savoir un report de son application au 1er février – a été jugée très insuffisante et la manifestation a repris, jusqu'au siège du Glac cette fois. Le sous-préfet s'est alors mêlé aux échanges, tout comme le ministère de l'Agriculture par téléphone. Une nouvelle rencontre, avec le préfet de la Charente-Maritime cette fois, était promise pour la fin de la semaine, suivie d'une autre, les jours suivants, avec la caisse régionale du Crédit agricole.
Pour les éleveurs, l'objectif à atteindre est simple : réduire les stocks à des niveaux acceptables et éviter ainsi une nouvelle baisse des prix. Ils ont déjà encaissé une perte d'environ 50 euros par 1.000 litres en deux ans, amplifiée par une nouvelle grille de paiement à la qualité qui ajoute des pénalités pouvant atteindre, pour certains, 90 €/1.000 l. La sécheresse de cette année, avec les problèmes d'affouragement et la hausse des coûts de production qu'elle a suscités, a encore accru les difficultés.
La crise de la filière caprine s'installe depuis deux ans. Plusieurs phénomènes y ont conduit. Tout est parti de l'engagement des laiteries à réduire leurs importations, à condition que les éleveurs accroissent leurs capacités de production. Ceux-ci y ont bien répondu, trop bien même, puisque la collecte a progressé de 9,1 % en 2009, puis de 6,4 % en 2010. Dans le même temps, la consommation n'a augmenté que de 0,5 %, alors que sa croissance était, depuis une vingtaine d'années, d'au moins 3 % par an.
Des trois grandes entreprises de collecte (le Glac, Eurial-Poitouraine et Lactalis), seule la première a mis en place un plan de maîtrise. Lactalis s'y refuse. Eurial prétend s'y mettre, mais sa collecte progresse toujours tandis que celle du Glac a baissé de 2 %. Pourtant, c'est bien cette dernière qui est sur la sellette. Ses stocks sont tels que, pour les écouler, il lui faudra les vendre à perte. C'est ce que le presse de faire le Crédit agricole, objet lui aussi de la rancœur des éleveurs. Et c'est pour pouvoir les écouler que la coopérative a prévu de baisser son prix de base.
Les producteurs s'y refusent. Nombre d'entre eux, déjà en difficulté, pourraient ne pas s'en remettre. En revanche, ils demandent aux laiteries de « mettre en place une réelle adaptation de l'offre et de la demande ». Et aussi « d'arrêter la guerre commerciale » qui se joue entre elles, avec des stratégies qualifiées, dans un récent rapport du ministère de l'Agriculture, de « prédatrices ». « Il faut redonner un sens à la filière caprine et des perspectives aux producteurs », plaide la Fnec, qui indique, dans un communiqué diffusé mercredi, qu'elle « continuera de mettre tout en œuvre afin d'obtenir le maintien du prix du lait pour toute l'année 2012 et dans toutes les entreprises. »