La surmortalité des abeilles observées dans de nombreux pays depuis le milieu des années 80 est due à une quarantaine de facteurs biologiques et chimiques notamment, dont le Varroa, parasite numéro un, selon une étude de l'Afssa publiée mercredi.
L'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) qui explique s'être «auto-saisie afin d'apporter des réponses aux apiculteurs français», classe en gros les causes de mortalité en cinq catégories.
Au premier rang, elle cite les agents biologiques – prédateurs, parasites, champignons, bactéries, virus – dont certains interagissent.
Le varroa destructor est l'un d'eux: déjà qualifié «d'ennemi numéro un» dans le rapport du député de la Haute-Savoie Martial Saddier, cet acarien parasite peut dépeupler une ruche en quelques années.
L'Afssa identifie également les agents chimiques, rappelant que «le catalogue des produits phytopharmaceutiques dénombre aujourd'hui 5.000 produits commerciaux» dont l'utilisation est susceptible de causer des dommages irréversibles aux colonies d'abeilles. Mais elle se garde bien de stigmatiser l'un ou l'autre.
Les auteurs - une équipe européenne qui a passé en revue la littérature scientifique sur le sujet - expliquent que «le rôle exact d'une exposition chronique à ces produits n'a pu être déterminée», pas plus que «le rôle direct ou indirect» de cette exposition dans la mortalité apicole.
Plusieurs molécules ont pourtant été visées par les apiculteurs depuis le début des années 2000: dernièrement, le Regent TS, accusé d'avoir provoqué une surmortalité des abeilles en 2002-2003 et dont la commercialisation avait alors été suspendue, a bénéficié d'un non-lieu qui a ravivé la colère des milieux apicoles.
L'environnement est également en cause, en particulier la perte de biodiversité due à l'agriculture intensive qui prive les abeilles de plantes à polliniser.
Les pratiques apicoles et la mauvaise tenue de ruches ont également été citées ainsi que d'autres causes difficiles à cerner à ce stade.
Pour Pierre Testud, du Réseau Biodiversité pour les abeilles, «les résultats du rapport (de l'Afsaa) confirment de façon scientifique ce que l'on pressentait. On savait bien que l'hécatombe était liée à des causes multifactorielles».
Mais il se réjouit de voir le Varroa spécifiquement désigné: «le problème existe depuis 1980 mais à ce jour seulement un tiers des ruchers sont traités. C'est important de voir le problème attesté au niveau national».
Selon une enquête de l'Autorité européenne de sécurité alimentaire, sur treize Etats consultés dans les années 2006 et 2007, neuf avaient déclaré une mortalité supérieure à 10% de leurs colonies d'abeilles.
En France, le rapport Saddier remis cet automne au ministre de l'Agriculture affirmait que le «taux de surmortalité de 30 à 35% des abeilles n'est plus contestable».
Outre le recensement des «tueurs» d'abeilles, l'Afssa émet plusieurs recommandations, notamment la création d'un réseau de surveillance des maladies qui permettrait de recueillir et d'analyser toutes les données épidémiologiques, alors qu'aujourd'hui, affirme Pierre Testud, «il n'existe aucune carte de France des pathologies».
L'Afssa appuie également la création d'un institut technique apicole, déjà proposé par le rapport Saddier et sur lequel un groupe de travail est à l'œuvre depuis janvier, croisant l'expertise des hommes de terrain et des scientifiques.