vendredi 20 janvier 2012 - 11h25
Passionné par l'étude des lieux-dits, Sébastien Carré met cette science au service des viticulteurs.
Microtoponymie, que peut-il se cacher derrière ce nom savant ? Rencontre avec Sébastien Carré, à Bar-sur-Seine, dans l'Aube, qui a découvert cette science pendant son master Vigne et terroirs à l'université de Bourgogne.
« Cette science pluridisciplinaire allie linguistique, histoire et aspects techniques pour étudier et interpréter les noms des lieux-dits, explique le jeune homme. Cette approche globale me convenait bien car je voulais appréhender toutes les facettes de la viticulture.
Alors que les noms des villages, appelés toponymes majeurs, évoquent souvent les éléments permanents du paysage originel, les lieux-dits, c'est-à-dire les microtoponymes, révèlent davantage des indices de paysage humanisé à travers l'occupation et la mise en valeur du sol. »
Un livre publié
Pour son mémoire de fin d'études, ce petit-fils de vignerons s'intéresse plus particulièrement aux microtoponymes de Volnay, village de la Côte-d'Or où ses grands-parents cultivent. Mais un lieu-dit peut susciter plusieurs hypothèses.
« Exemple : La Robardelle, premier cru et appellation village, peut être interprété comme un repère de brigands et de voleurs, souvenir de la guerre de Cent Ans », raconte Sébastien, qui n'a négligé aucun indice pour percer le mystère des noms les plus complexes.
« Mais un deuxième sens peut lui être attribué : le même que “robardie”, mot qui dans l'ancien français désignait des fêtes bruyantes, accompagnées de chants sous les frondaisons en vêtements élégants. »
Au final, son mémoire fera plus de cent pages. Son professeur, Françoise Dumas, l'encourage à le publier et signe la préface. Volnay, l'Histoire au cœur des climats et terroirs, sort en 2004.
Aujourd'hui, conseiller viticole à la chambre d'agriculture de l'Aube, le microtoponymiste est en passe de transformer sa passion en métier.
« A la demande de certains viticulteurs, je commence à étudier les lieux-dits de l'Aube. Les personnes qui achètent du champagne veulent connaître son histoire et celle de son terroir.
Les producteurs ont envie de réaliser des fiches pour en expliquer les particularités et les mettre à disposition des clients.
La microtoponymie peut servir le marketing mais aussi l'élaboration des champagnes. En associant des vins issus de parcelles ayant la même origine, on peut espérer obtenir un produit plus homogène. »
Remonter le temps
Pour étudier les microtoponymes, Sébastien Carré se plonge dans les livres d'histoire, consulte les manuscrits des archives départementales ou privées qui remontent jusqu'au XIIe siècle. Il faut alors déchiffrer l'écriture et le vieux français.
La consultation du cadastre est également indispensable : celui du xixe siècle est le plus intéressant. Il observe ensuite minutieusement chaque parcelle pour interpréter les informations recueillies.
L'échange avec les viticulteurs permet également de valider certaines hypothèses.
Chantal Urvoy
(publié le 20 janvier 2012)
Le commentaire d'article est réservé aux abonnés de La France Agricole.
Si vous êtes abonné, identifiez-vous dans le bloc "services experts"
situé en haut à droite de la page.
Si vous voulez vous abonner et profiter de tous les contenus du site ainsi que de l’édition papier de La France Agricole, cliquez sur le lien ci-dessous :
Nos offres d'abonnement
simples ou couplées,
à nos publications
hebdomadaires
et mensuelles
Découvrir nos Offres