Avril 2011 a été le deuxième mois d'avril le plus chaud depuis 1900, après celui de 2007, avec une température moyenne de 14,5 °C, supérieure de 4 °C à la normale saisonnière. C'est aussi le mois le plus sec depuis 1959.
Une situation qui n'est pas sans conséquences sur le développement des céréales qui étaient au stade critique de la montaison à cette période. « Un déficit hydrique pendant la montaison et avant la floraison entraîne d'abord une régression des talles, puis un faible peuplement épis. Ensuite, la fertilité de l'épi est affectée, à cause de la régression d'épillets, d'une part, et de la diminution du nombre de fleurs par épillet, d'autre part », explique Jean-Charles Deswarte, d'Arvalis-Institut du végétal.
Enfin, pendant la floraison, le stress hydrique pénalise la fécondation (nombre de grains par épi), tandis que pendant le remplissage (surtout en phase précoce), c'est le poids de mille grains qui est pénalisé.
Mais selon Jean-Charles Deswarte, un stress hydrique au cours de la montaison est compensable si l'alimentation hydrique et azotée sont complètement rétablies à la floraison et que le peuplement en épis n'est pas trop pénalisé par le stress préfloraison (maintien au minimum de 400-450 épis au mètre carré selon les variétés).
Or, beaucoup de parcelles ont subi des stress hydriques préjudiciables au point d'être irréversibles (1). Car le pic de sensibilité au manque d'eau court du stade du gonflement jusqu'à vingt jours après la floraison.
Développement très rapide
Les fortes températures jouent aussi un rôle. « La sortie des feuilles dépend de la température, explique la chambre d'agriculture de la Picardie dans une note publiée le 10 mai 2011. En fonction de l'espèce et de la date de semis, ce délai, appelé phyllotherme, varie de 70 °Cj (2) à plus de 110 °Cj. »
Ainsi, mécaniquement, plus il fait chaud, plus le délai calendaire entre la sortie de deux feuilles est court. C'est ce qui se passe cette année, avec une montaison qui s'est déroulée dans des conditions très chaudes. Les stades se sont donc enchaînés très rapidement.
« Au stade de l'épi à 1 cm, les blés accusaient un retard de quelques jours... Au stade de l'épiaison, l'avance sera de quatorze jours pour un Bermude semé au début d'octobre, par exemple, de dix à douze jours pour la mi-octobre et un peu moins de dix jours pour les semis de novembre », chiffre l'organisme de Picardie.
Il est à noter que la température de l'air ne reflète pas fidèlement la température du couvert et on a plutôt tendance à la sous-estimer. « Le fort rayonnement et l'arrivée progressive des cultures en situation de stress hydrique concourent à un échauffement du couvert, ce qui précipite l'émission des feuilles », estime la chambre d'agriculture.
Mais sous l'effet du manque d'eau, les feuilles se redressent et s'enroulent. Cet état transitoire peut se révéler irréversible si le stress perdure. Dans ce cas, les feuilles entrent en sénescence précoce, du bas vers le haut de la tige.
« En cas de stress hydrique extrême, il peut arriver que la céréale arrête complètement son développement. On en est pas là pour le moment », rassure toutefois Jean-Charles Deswarte.
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(1) Lire Sécheresse : les quintaux s'égrènent (tour de plaine)
(2) Dégrés jours.
Taches physiologiques favorisées Les conditions climatiques des dernières semaines ont été favorables à l'apparition de taches physiologiques, qualifiées aussi de « stress oxydatif ». Les fortes températures maximales, les faibles températures nocturnes, les rayonnements élevés et le stress hydrique ont « déréglé la machine bien huilée de la photosynthèse et entraîné l'accumulation de composés oxydants dans les céréales », informe Arvalis. Certains traitements phytosanitaires, notamment fongicides, constituent des facteurs aggravants de ces nécroses. |
Déficit hydrique : limitation de la transpiration Le déficit hydrique s'installe dans la plante quand l'absorption ne peut pas satisfaire la demande de la transpiration. La culture a épuisé sa réserve facilement utilisable (sans réduction de sa croissance), évaluée aux deux tiers de la réserve en eau du sol en sol peu profond et entre la moitié et les deux tiers dans les sols profonds. |
par Isabelle Escoffier (publié le 20 mai 2011)
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