La sélection assistée par marqueurs de seconde génération est sur les rails. Elle a fait son entrée dans les schémas génétiques prim’holstein, montbéliard et normand au mois d’octobre. Une simple analyse de sang réalisée dans les premiers jours de vie de l’animal permet désormais d’avoir une information fiable sur sa valeur génétique. Et tout cela avec une précision identique qu’il s’agisse d’un jeune mâle ou d’une jeune femelle.
Scruter le génome
La Sam2 est le fruit d’une étroite collaboration depuis le milieu des années 1990 entre l’Inra (1), l’Unceia (2), les entreprises de sélection et Labogena. Elle succède à la Sam de première génération, en place depuis 2000. Cette étape a contribué à une meilleure connaissance du patrimoine génétique des bovins et a laissé le temps de prévoir une nouvelle organisation de la sélection sur le terrain pour déployer la Sam2.
La Sam s’intéresse à des régions du génome impliquées dans l’expression de caractères tels que la production laitière, les taux de matière utile ou encore la fertilité. Ce sont les QTL (Quantitative Trait Loci), qui existent sous différentes formes, appelées allèles. Les sélectionneurs utilisent des marqueurs génétiques pour repérer les allèles intéressants chez les taureaux en cours d’évaluation. Toutes les informations recueillies sont utilisées dans des équations pour calculer les index des reproducteurs.
«Aujourd’hui, quinze caractères sont indexés avec la Sam2, détaille Sébastien Fritz, spécialiste de la Sam à l’Unceia. Ce nombre est appelé à évoluer. Nous serons capables d’ajouter tous ceux qui peuvent faire l’objet de mesures par le contrôle de performances.» Le contrôle laitier reste indispensable en routine pour la mise au point en continu des équations.
Les caractères évalués par la Sam2 couvrent aujourd’hui l’ensemble des objectifs de sélection des races concernées: production laitière, morphologie et caractères fonctionnels. «Mais cette approche pourrait également être une bonne alliée pour la prise en compte, dans les schémas de sélection, de nouveaux caractères difficiles à mesurer en routine, poursuit Sébastien Fritz. Par exemple, la composition fine du lait : en acides gras, en matières protéiques...»
Evalués dès la naissance
Dans le modèle de sélection précédent, les jeunes mâles étaient recrutés par évaluation sur ascendance, insuffisante pour connaître avec précision leur valeur génétique. Par conséquent, leur semence ne pouvait être diffusée qu’après testage sur descendance. Autrement dit, une fois qu’ils ont eu des filles et que celles-ci ont été soumises au contrôle de performances. Il s’écoulait donc au minimum six ans entre la naissance d’un taureau et sa diffusion par insémination artificielle.
«La Sam2 assure une évaluation efficace plus précoce des animaux», affirme Sébastien Fritz. Plus efficace que l’évaluation sur ascendance, puisqu’elle aboutit à des coefficients de détermination (estimations de la précision des index) compris entre 0,5 et 0,65 suivant le caractère étudié, contre 0,2 à 0,4 pour l’évaluation sur ascendance. Elle est également plus précoce que le testage sur descendance, puisque le génotypage peut avoir lieu dès la naissance de l’animal. Les coefficients de détermination des index obtenus avec la Sam2 sont supérieurs à 0,5. Cette valeur suffit pour commercialiser la semence d’animaux sans attendre les résultats du testage sur descendance. En pratique, ce sont quatre années de gagnées par rapport au schéma classique.
Toutefois, la précision des index obtenus par Sam2 reste inférieure à celle des index après testage sur descendance. L’utilisation d’index Sam2 demande donc plus de prudence de la part des entreprises de sélection. Par sécurité, il faut diffuser un plus grand nombre de taureaux pour minimiser le risque d’une mauvaise mise. «Là où on diffusait quinze taureaux testés sur descendance, il faudra en diffuser trente à quarante-cinq évalués avec la Sam2», estime Sébastien Fritz, qui rappelle que la descendance de ces animaux génotypés est ensuite toujours soumise au contrôle de performances.
Sur le plan économique, un génotypage coûte 200 euros, loin des 40.000 euros du testage sur descendance. Même s’il faut génotyper de dix à vingt veaux avant d’en avoir un diffusable, il y a de grosses économies à la clé pour les entreprises de sélection. Et les éleveurs bénéficieront d’un plus large choix de taureaux dans les catalogues d’insémination.
A l’étranger, une autre approche de sélection assistée par marqueurs a été retenue (voir l'encadré). Les avantages et inconvénients des deux systèmes conduisent à une efficacité comparable. «Attention cependant! prévient Sébastien Fritz. En France, la collaboration entre les entreprises de sélection et l’Inra garantit la fiabilité des informations. A l’étranger, les entreprises de sélection n’étant pas liées à la recherche, le système commercial dans lequel elles évoluent ne garantit pas l’objectivité des résultats.»
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(1) Institut national de la recherche agronomique.
(2) Union nationale des coopératives d’élevage et d’insémination animale.
Généralisation dans les deux ou trois ans Avant d’étendre la Sam2 aux autres races, il faut s’assurer que les gènes retenus actuellement présentent une variabilité suffisante chez les races à plus faible effectif. Le projet pourrait voir le jour d’ici deux à trois ans. |
La sélection génomique en complément La sélection génomique est une autre méthodefaisant appel à des marqueurs génétiques. C’est l’approche retenue notamment par les Etats-Unis, le Canada, les Pays-Bas et le Danemark. Elle utilise des marqueurs répartis sur l’ensemble du génome, sans se limiter à ceux qui servent à repérer les QTL. Les calculs d’index intègrent donc des parties du patrimoine génétique de l’animal qui ne sont pas impliquées dans l’expression des caractères sélectionnés. Cela introduit un biais. A l’inverse, la Sam2 choisie par la France, n’utilise que l’information des QTL identifiés. Elle oublie de ce fait certaines régions du génome ayant un effet sur les caractères sélectionnés. Au bout du compte, les deux méthodes obtiennent actuellement des coefficients de détermination voisins pour les différents index. A l’avenir, il est probable que tous les sélectionneurs combineront les deux approches. Afin que les données précises fournies par les QTL soient complétées par une information moins précise mais plus abondante venant du reste du génome. |
par Bérengère Lafeuille (publié le janvier 2009)
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