Le Parlement français a adopté définitivement, le 26 juin, par un ultime vote de l'Assemblée nationale, une proposition de loi du PS contre le dumping social, afin de renforcer les contrôles et les sanctions contre les entreprises ayant recours de manière abusive à des travailleurs détachés.
Ce texte de « lutte contre la concurrence sociale déloyale » a été voté par les députés socialistes, écologistes, radicaux de gauche et centristes, tandis que les élus du Front de gauche et de l'UMP se sont abstenus.
La proposition de loi vise à traduire par anticipation en droit français le compromis survenu en décembre 2013 au niveau européen à propos du renforcement de la directive relative aux travailleurs détachés.
Cette directive de 1996 prévoit que le « noyau dur » des règles du pays d'accueil s'applique (salaires, conditions de travail...) lors du détachement d'un travailleur dans un pays de l'UE même si les cotisations sociales restent dues dans le pays d'origine. Mais elle fait l'objet de fraudes croissantes de toutes sortes qui créent des cas de concurrence déloyale.
Tous les secteurs sont concernés
La proposition de loi instaure, comme dans l'accord européen, le principe de « responsabilité solidaire » qui permettra de poursuivre un donneur d'ordre pour des fraudes relevant d'un de ses sous-traitants ayant recours à des travailleurs détachés. Mais elle va au-delà puisque la responsabilité solidaire couvrira non seulement le BTP mais aussi tous les autres secteurs fortement concernés par le détachement (agroalimentaire, transport, etc.), ce qui n'est que facultatif dans le compromis européen.
Le texte met aussi en place une liste noire sur internet, où pourront figurer pendant deux ans, sur décision du juge, les entreprises ayant été condamnées pour « travail illégal » à une amende. Le juge pourra interdire le versement d'aides publiques pendant cinq ans à une entreprise condamnée pour travail illégal.
Un dispositif unique de solidarité financière est aussi créé, applicable au donneur d'ordre et au maître d'ouvrage, en cas de non-paiement du salaire minimum à un salarié d'un sous-traitant, qu'il soit détaché ou non.
Le rapporteur de la proposition de loi, Gilles Savary (PS), a salué les dispositions « équilibrées » de ce texte « inspiré » par les organisations patronales, avec l'approbation des organisations syndicales.
Au nom du gouvernement, Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement, a jugé que « la France pousse son avantage en Europe » avec cette loi, face à un « dumping social inacceptable ».
Les députés de l'UMP, bien que n'étant pas « opposés au cœur du texte », se sont abstenus, estimant que les sanctions encourues par les entreprises sont trop lourdes, a justifié au nom du groupe Patrick Hetzel.
Le Front de gauche a fait de même, en expliquant, par la voix de Jacqueline Fraysse, que « responsabiliser le donneur d'ordre est une bonne disposition » mais que « ce qui est proposé relève du cosmétique ». Elle a plaidé pour « une directive contraignante » au niveau européen.