Le président Nicolas Sarkozy a confirmé l'adoption d'une taxe carbone, mais uniquement si l'Europe met en place une « taxe aux frontières » de l'Europe pour protéger l'agriculture et l'industrie, mercredi à l'issue du conseil des ministres.
Le Premier ministre François Fillon avait annoncé la veille le report sine die de la taxe carbone aux députés de l'UMP.
« Je confirme notre choix d'une fiscalité écologique mais je subordonne la création d'une taxe carbone intérieure à une taxe aux frontières (de l'Europe) qui protègera notre agriculture et nos industries contre la concurrence déloyale de ceux qui continuent à polluer sans vergogne », a déclaré M. Sarkozy devant la presse lors de sa première déclaration après la défaite de son parti aux régionales.
« Je lance un appel à une prise de responsabilité générale pour que l'Europe admette le principe de la protection des entreprises et de ses emplois contre les concurrences déloyales », a-t-il ajouté.
« Le dumping environnemental menace nos emplois. Il serait absurde de taxer les entreprises françaises en donnant un avantage compétitif aux entreprises des pays pollueurs », a justifié le chef de l'Etat.
Deuxième syndicat agricole à réagir à cette annonce, après la FNSEA hier, la Coordination rurale (CR) a indiqué mercredi qu'elle « apprécie cette reconsidération d'une fiscalité verte aux contours mal définis ». Cependant, le syndicat souligne qu'il aurait été « plus sage d'évaluer de façon objective et rigoureuse l'opportunité d'une taxation du carbone avant la publication des textes plutôt que de gérer un retrait dans le trouble des résultats des élections régionales ».
« La CR persiste à demander que soient réalisées [...] des investigations précises sur l'impact positif de l'agriculture, capable de fixer d'énormes quantités de carbone. »
L'ancien Premier ministre socialiste Michel Rocard, qui recommandait dans son rapport remis en juillet 2010 la mise en place d’une taxe carbone dès 2010 sur l’ensemble des énergies fossiles, a qualifié le report de la taxe carbone de « très mauvaise nouvelle », mercredi sur France Inter.
« Mais elle se fera bien un jour », a-t-il ajouté, car « on ne va tout de même pas laisser la planète devenir doucement une poële à frire dans laquelle la vie deviendra impossible ».
« Dans une dizaine d'années », on parlera de “crime contre l'humanité” à propos de ceux qui auront “pris du retard” », a estimé Michel Rocard, qui avait déjà déclaré mardi qu'il n'est « pas très courageux » de la part du gouvernement de renoncer à mettre en œuvre la taxe carbone comme prévu au 1er juillet 2010.
La secrétaire d'Etat à l'Ecologie, Chantal Jouanno, a exclu quant à elle de démissionner. Après avoir affirmé la veille qu'elle était « désespérée » à la suite de l'annonce du report sine die de la mise en place d'une taxe carbone en France par François Fillon, elle a déclaré sur RTL rester « totalement déterminée », repoussant « tous ces discours qui consistent à dire » que l'écologie est responsable des maux de l'économie, de l'agriculture et de la société.
Chantal Jouano a réaffirmé qu'à ses yeux, la mise en place d'une taxe carbone en France ne devait pas dépendre d'une démarche identique au niveau européen. « Les deux sujets n'ont pas à être liés. Il y a plusieurs pays européens qui ont mis en place une taxe carbone, qui économiquement ne s'en portent pas plus mal, loin de là », a-t-elle souligné.
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