Face à la fronde du patronat, le gouvernement avait chargé deux missions de lui proposer des pistes de simplification du compte pénibilité. Leurs conclusions ont été remises mardi matin au Premier ministre, qui devait annoncer à la mi-journée ses décisions.
Dans leur synthèse (1), les rapporteurs (le député PS Christophe Sirugue, le chef d'entreprise Gérard Huot et le conseiller à la Cour des comptes Michel de Virville) reconnaissent « l'application complexe de certains critères d'exposition », en particulier dans les petites entreprises. Ils formulent douze propositions « de nature à atténuer les craintes des organisations patronales » mais sans toucher au nombre de facteurs (dix) ni à la mécanique d'acquisition des points.
Mesure phare de la réforme des retraites de 2014, le compte pénibilité doit permettre aux salariés du privé ayant exercé des métiers pénibles de se former, travailler à temps partiel ou partir plus tôt à la retraite en accumulant des points. Il est partiellement en vigueur (pour quatre facteurs) depuis janvier. Les rapporteurs excluent un report du calendrier à 2016 pour les six derniers facteurs, mais ils préconisent que l'administration s'abstienne « de tout contrôle spontané les deux premières années ».
Simplifier la procédure de déclaration
Tout d'abord, ils proposent de simplifier la procédure de déclaration en transformant la fiche d'exposition en une « déclaration annuelle » à la Caisse nationale d'assurance vieillesse, « via le logiciel de paie ». Mais le salarié et le médecin du travail resteront « informés chaque année ».
Ils recommandent ensuite d'inciter les entreprises à s'appuyer sur des « accords de branche ou référentiels professionnels » définissant des « situations types d'exposition ». Pour « sécuriser le dispositif » juridiquement, ils suggèrent que ces « modes d'emploi », déjà prévus dans la loi, soient « homologués » par l'administration et deviennent « opposables » en cas de litige. Ainsi, « en cas de contentieux, les employeurs appliquant un référentiel ne pourront pas être pénalisés financièrement ».
Le rapport recommande aussi de réduire le délai de contentieux à deux ans (au lieu de trois).
La piste d'un « bonus-malus »
Les entreprises devront rester libres d'appliquer ou pas ces modes d'emploi. Mais pour certains facteurs, plus difficiles à mesurer individuellement, ils sont « indispensables », en particulier ceux « relatifs aux contraintes physiques marquées », estiment-ils. En revanche, d'autres facteurs (travail de nuit, en équipes alternantes, en milieu hyperbare, voire températures extrêmes et bruit) « devraient pouvoir être suivis de manière individuelle par l'employeur ».
Pour encourager la prévention, ils suggèrent également de donner des « aides financières » aux entreprises inventoriant les risques pour leurs salariés, ce qu'elles sont censées faire depuis 2001. La piste d'un « bonus-malus » mériterait d'être « expertisée », écrivent-ils.
Enfin, ils prônent de « réviser » légèrement certains seuils (comme le bruit) et préciser plusieurs autres (agents chimiques, travail de nuit, répétitif ou en équipe).
Plusieurs recommandations nécessitent des évolutions législatives. Elles devraient faire l'objet d'amendements au projet de loi sur le dialogue social, dont l'examen débute ce mardi 26 mai à l'Assemblée nationale.