L'élevage pollue plus que les transports. Cette conclusion d'un rapport de la FAO sur l'impact environnemental de l'élevage pour la planète (1) suscite de vives controverses depuis sa parution, à la fin de 2006.
Ce document dresse un tableau sombre de la situation, sans concession vis-à-vis de la responsabilité de l'élevage dans l'émission de gaz à effet de serre et dans la dégradation de l'environnement, sols et eaux principalement, mais aussi dans la réduction de la biodiversité.
Le 29 janvier, des chercheurs de l'Inra et des ingénieurs de l'Institut de l'élevage ont commenté ce travail. Ils en critiquent certaines approximations, mais ne remettent pas en cause les conclusions générales: de par le monde, l'élevage fait payer un lourd tribut à notre planète.
Les impacts semblent plus prononcés en élevage pastoral des zones sahéliennes (désertification et érosion liées à un surpâturage) et en élevage intensif industriel (pollution par lessivages de phytos, par N et P sur les cultures fourragères, par les effluents, par antibiotiques...).
En revanche, les prairies bénéficient de l'indulgence des intervenants. Même si les ruminants sont de gros émetteurs de méthane, un gaz à effet de serre particulièrement virulent, les prairies ont un rôle positif dans la lutte contre l'érosion et contre le lessivage, pour la régulation du cycle de l'eau (plus efficace que les forêts), ainsi que dans son influence favorable pour la biodiversité et la qualité des productions animales.
Trouver des solutions s'impose, d'autant que la demande en protéines animales va doubler dans les 40 prochaines années avec l'accroissement de la population et du pouvoir d'achat. D’après les estimations de la FAO, la production mondiale de viande passera de 229 millions de tonnes en 1999/2001 à 465 millions de tonnes en 2050, tandis que celle de lait devrait grimper de 580 à 1.043 millions de tonnes.
Pour y répondre, l'intensification de la production animale et fourragère semble inévitable pour les rédacteurs du rapport, ne serait-ce que pour diminuer l'emprise de la production animale sur le sol et réduire la déforestation. L'enjeu est néanmoins d'éviter une trop forte concentration des productions hors-sol, sources de concentration des pollutions. L'Institut de l'élevage souligne par ailleurs certaines limites de cette proposition, par exemple les émissions de méthane par les ruminants augmentent avec la digestibilité de la ration.
Le prix des ressources naturelles (terres, eau et ressources fourragères) devraient être évalué et leur préservation prise en compte. L'application du principe de «pollueur-payeur» sera nécessaire. La recherche zootechnique a également son rôle à jouer. L'Inra cite des pistes: une meilleure valorisation de la ration, une diminution de la méthanogenèse du rumen via des biotechnologies modifiant l'écosystème microbien de la panse, un apport d'aliments concentrés à base de céréales dans la ration.
Enfin, des politiques territoriales de soutien financier s'imposent, mais elles sont mal venues au niveau international, qui les assimile à une distorsion de concurrence. Un engagement politique fort serait nécessaire pour passer outre.
(1) Le rapport complet de la FAO sur l'impact environnemental de l'élevage pour la planète (en anglais «Livestock's long shadow») et le résumé sont disponibles aux adresses suivantes.
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http://www.fao.org/docrep/010/a0701e/a0701e00.htm (rapport en anglais)
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http://www.fao.org/newsroom/fr/news/2006/1000448/index.html (résumé en français)