Dans son rapport annuel sur la Sécurité sociale, présenté le mardi 17 septembre 2013, la Cour de comptes dénonce les dérives de la branche vieillesse du régime agricole : son déficit, financé par un emprunt bancaire à court terme, devrait approcher un milliard d'euros en 2013.
Le régime agricole est structurellement déficitaire en raison d'un ratio démographique défavorable : il compte moins de 500.000 cotisants pour 1,6 million de bénéficiaires. Les cotisations ne couvrent ainsi que moins de 13 % des charges du régime de base (1,1 milliard). Les financements complémentaires en provenance d'autres régimes de Sécurité sociale et de l'Etat (6,7 milliards) sont insuffisants pour assurer l'équilibre de la branche vieillesse du régime. Ce déficit oblige la MSA à recourir à des emprunts bancaires à taux élevé et son niveau d'endettement est évalué à 3,2 milliards pour la fin de 2013.
Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes, a déclaré qu'« un redressement de l'effort contributif de la profession apparaît nécessaire ». L'institution estime en effet que les différentes pratiques d'optimisation et de sous-déclaration réduisent l'assiette de cotisation de l'ordre de 2 milliards, ce qui représente un manque à gagner pour les cotisations d'assurance vieillesse d'environ 0,3 milliard.
Pour redresser les comptes, la Cour des comptes formule cinq recommandations :
1. Elle veut s'attaquer au régime fiscal du forfait, qui sert d'assiette aux cotisations sociales. Elle demande d'abaisser le seuil du chiffre d'affaires au-delà duquel les déclarations doivent être réalisées au réel et remplacer le bénéfice agricole forfaitaire par un bénéfice agricole établi en proportion du chiffre d'affaires.
2. Soumettre les revenus des associés non exploitants à une contribution sociale spécifique.
3. Majorer l'assiette sociale des exploitants n'adhérant pas à un organisme agréé, comme pour l'impôt sur le revenu.
4. Modifier profondément l'organisation de l'établissement et du contrôle des cotisations personnelles des agriculteurs, notamment en développant la coopération et les échanges de données informatiques entre les services fiscaux et les caisses de MSA.
5. Assurer l'équilibre du régime par des financements de solidarité suffisants et pérennes en réexaminant les autres formes de concours au secteur agricole. La Cour souligne que le secteur agricole bénéficie de financements constitués pour l'essentiel d'aides européennes, mais aussi nationaux sous forme de dépenses budgétaires ou d'affectation d'impôts ou taxes affectés (ITAF). « Un redéploiement d'une partie de ces ITAF, qui financent les chambres d'agriculture et l'action de différents établissement publics et de centres techniques pour un montant de près de 450 millions d'euros, pourraient être envisagés au bénéfice de la protection sociale agricole », suggère la Cour.
Le rapport de la Cour des comptes revient sur la faiblesse des pensions agricoles. Elle souligne que « la pension médiane des exploitants agricoles (900 euros environ, y compris la retraite complémentaire et pour une carrière complète), est très largement inférieure à la pension médiane de l'ensemble des retraités (1.500 euros) ». Et elle ajoute que « près de 10 % des retraités du régime des exploitants agricoles avec une carrière complète disposent d'une pension globale inférieure à 600 euros par mois ».
Pour revaloriser ces petites pensions, le projet de loi de réforme des retraites prévoit la mise en place d'une pension minimale de 75 % du Smic net pour une carrière complète d'ici à 2017. Ainsi, alors que la branche vieillesse est déjà fortement déficitaire, il faudra trouver de nouveaux financements pour ces mesures de revalorisation (de l'ordre de 300 millions d'euros par an). Le gouffre financier risque donc de se creuser. Et là encore, il est prévu que ces mesures soient « autofinancées » par les actifs agricoles !
A télécharger :
- Synthèse du rapport annuel sur la Sécurité sociale de 2013 (à partir de la page 51)
- Rapport annuel sur la Sécurité sociale (à partir de la page 423)
Titre
mercredi 18 septembre 2013 - 10h44
S'il n'y avait qu'un seul régime de retraite pour tout le monde, sans exception ça irait beaucoup mieux. Il ne faut pas oublier que l'on a tout fait pour faire disparaitre les exploitations trop petites, c'est la conséquence du rapport "Rueff" pour ceux qui s'en souviennent ,préconisant la diminution massive des actifs agricoles; le déséquilibre demographique en est la conséquence et c'est donc à la solidarité nationale d'intervenir. D'un autre côté il est scandaleux de voir qu'en parallèle subsistent les fameux régimes spéciaux (SNCF, etc...) qui favorisent honteusement ceux qui en profitent, au détriment du reste de la Société.